Hallucinations Collectives – 14ème édition du 31 Août au 6 Septembre

Pour la deuxième année consécutive (pas besoin d’évoquer les raisons que chacun pourra deviner), les Hallucinations Collectives se dérouleront du 31 août au 6 septembre, et non lors du traditionnel créneau de Pâques. La manifestation toujours située dans l’enceinte du Cinéma Comœdia compte également deux changements dans la conception de sa programmation. En raison des incertitudes du moment et d’un calendrier de sorties bouleversé, la compétition de longs-métrages est remplacée par une sélection de films issus des deux dernières décennies invisibles en salles dans l’hexagone. D’autre part, la section Carte Blanche (accordée l’an passé à Xavier Gens) laisse exceptionnellement place à un cabinet de curiosités élargi. Après un cru 2020, particulièrement relevé, riche et qualitatif, quelles sont les promesses de cette 14ème édition ?

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Belle – Copyright Studio Chizu 2021

Unique avant-première pour l’ouverture, Belle de Mamoru Hosoda. Présenté en séance spéciale sous le label Cannes Premières au Festival de Cannes 2021, ce nouvel opus du réalisateur de La Traversée du temps et des Enfants Loups, Ame & Yuki, n’arrivera sur les écrans français qu’en toute fin d’année, le 29 décembre. Relecture contemporaine de La Belle et la bête, il entend mêler deux facettes du cinéma de son auteur, la quête d’onirisme, de poésie, mais aussi un goût des univers virtuels déjà éprouvé dans Summer Wars. Le cinéaste s’est entouré de l’animateur coréen Jin Kim, connu pour ses collaborations avec les studios Disney, on lui doit notamment la conception des personnages de Zootopie, Les Mondes de Ralph ou encore La Reine des Neiges. Nul besoin de préciser que ce mariage des cultures excite autant qu’il attise la curiosité. À noter que la projection sera précédée du court-métrage de Nieto, Swallow The Universe. Concernant la clôture, nous aurons droit en guise de bouquet final au Shin Godzilla (ou Godzilla Resurgence) d’Hideaki Anno et Shinji Higuchi, blockbuster japonais sorti en 2016, très peu diffusé dans les salles hexagonales (au PIFF en 2017 puis à la cinémathèque française en 2019) et encore inédit à ce jour. Mis en scène notamment par le créateur de l’animé Evangelion, Hideaki Anno, outre le retour du célèbre monstre de la Toho dans ses terres natales, ce Gozdilla est encore aujourd’hui l’un des plus gros succès de l’histoire du pays du soleil levant, récompensé plusieurs prix prestigieux à la Japan Academy Prize en 2017. Le découvrir dans un contexte festif et passionné constitue une opportunité rare que nous ne manquerons pas de saisir.

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Dredd – Copyright Lionsgate 2012

La section Privés de sortie se divise en deux catégories, celles des œuvres quasi méconnues et celles de propositions moins confidentielles, dont l’échec au box-office américain aura eu raison d’une exploitation « classique ». Hyper Tension 2 de Mark Neveldine & Brian Taylor et Dredd de Pete Travis, entrent en ce sens, dans la deuxième catégorie. Succès surprise de 2007, Hyper Tension, porté par la nouvelle star du cinéma d’action, Jason Statham, proposait sur la base d’un argument de départ WTF, un plaisir régressif, jouissif et inventif. Deux ans plus tard, sa suite, toujours signée du duo Neveldine et Taylor (qui allait ensuite se perdre en chemin), repoussait les limites du bon goût et de la vulgarité pour offrir une séquelle encore plus barrée et parfois proche de l’expérimentation pure, aux airs improbables de GTA filmique (qu’on s’entende bien, plutôt les versions Playstation en 2D que leurs successeurs). Fiction mal élevée et jusqu’au-boutiste, Crank : High Voltage (de son titre original), fera office de sas de décompression au sein de propositions intenses, dont il serait dommage de se priver. Oubliez le traumatisme de la première adaptation de Judge Dredd par le médiocre Danny Cannon avec Sylvester Stallone, la BD John Wagner et Carlos Ezquerra a trouvé en 2012 de bien meilleures mains pour lui donner vie. Écrit et produit par l’excellent Alex Garland (souvent évoqué comme le réalisateur officieux de l’essentiel du long-métrage) à qui l’on doit les scripts de 28 Jours plus tard et Sunshine, plus tard metteur en scène d’Ex Machina et Annihilation, ce Dredd constitue un modèle de série B violente et intelligente, concrétisant avec une efficacité redoutable ses ambitieuses intentions. Véritable anomalie dans le système hollywoodien du début 2010 en pleine marvelisation, il s’agit également de l’un des rôles les plus badass du sous-estimé Karl Urban. Réalisateur talentueux, Christopher Smith a malheureusement rarement eu le privilège de la salle obscure sous nos latitudes. Si les très bons Creep et Severance en bénéficièrent, ce ne fut pas le cas de l’excellent Black Death (réflexion sur la foi, déguisée en thriller médiéval) et du non moins passionnant Triangle. Suspens retors à base de voyage dans le temps, le film sera donc visible dans les meilleures conditions, pour la première fois en France. Cinéaste souvent à l’honneur aux Hallus (souvenez-vous des projections de Tokyo Tribe ou de The Virgin Psychics), Sono Sion demeure un auteur confidentiel, difficile à suivre dans l’hexagone, tant son œuvre peine à trouver le chemin des cinémas. Cold Fish, réalisé en 2010 (sorti dans nos contrées en VOD trois ans plus tard) dans la foulée de Love Exposure, qui aura plongé le metteur en scène, déçu du résultat final, en dépression, est à (re)découvrir sur grand-écran. Il s’empare alors d’un script de Yoshiki Tajahashi inspire d’un fait divers sordide, pour en creuser la dimension la plus sombre. En résulte, un long-métrage nihiliste et violent, auscultant froidement le mal, dévoilant un regard définitivement singulier. 68 Kill de Trent Haaga et Mindgame de Masaaki Yuasa complètent le programme.

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Ichi The Killer – Copyright Kubik 2007

La nuit du vendredi, baptisée pour cette édition Soirée de la provoc’ et du mauvais goût proposera un double programme à faire fuir les aficionados de Catherine Frot, Jean-Pierre Darroussin et Brie Larson. Déjà à l’honneur lors de la soirée thématique de 2020 avec le très bon Lesson of the Evil, l’ultra prolifique Takashi Miike est de nouveau sous le feu des projecteurs puisque sera diffusée l’une de ses réalisations les plus extrêmes, Ichi The Killer (2001). Adapté du manga éponyme, Miike au meilleur de sa forme bouscule la notion même d’outrance en signant une œuvre libre, violente et méchante, résolue à malmener la bienséance du début à la fin. Cerise sur le gâteau, le film sera proposé en copie restaurée (merci à la Cinémathèque de Bologne déjà à la manœuvre sur La Strada et À Bout de souffle). Les connaisseurs le savent, le cinéma populaire espagnol est bien différent de celui proposé chez nous, le triomphe public et critique dont fit l’objet Torrente en 1998 en est la preuve éclatante. Santiago Segura, remarqué chez Alex de La Iglesia dans Action Mutante et Le Jour de la bête, signait son premier long-métrage (après plusieurs courts début 90). Acteur, producteur, scénariste et réalisateur, il incarne un ex-policier raciste, misogyne, vulgaire, alcoolique et cynique tentant de rétablir l’ordre dans les bas-fonds de Madrid. Un protagoniste aussi ignoble que caricatural, campé avec délice et malice par Segura qui propose en creux une impitoyable peinture méchante et acerbe de l’Espagne, à se tordre de rire, pour peu qu’on soit réceptif à cet humour certes graveleux mais totalement assumé !

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Torrente – Copyright Warner Bros. Ent. España 2008

Le Mysticisme par la face Est, titre imagé qui désigne une sélection de longs-métrages traitant des différents folklores de l’Orient. Si le Japon et Hong-Kong seront représentés au travers de The Burning Buddha Man, à l’animation originale composée de peintures sur papier découpé, et de Seeding of a Ghost, produit par la Shaw Brothers, d’autres pays, plus inattendus, seront abordés. C’est le cas de la Russie avec Vij, premier film d’horreur produit en Union Soviétique en 1967, inspiré d’une nouvelle de Nicolas Gogol et fort d’une approche graphique proche d’une horreur gothique et colorée chère au Mario Bava du Corps et le fouet. Autre destination, la Turquie et ses mythes islamiques emplis de Djinns qui sont au cœur de La Puissance du feu, réalisé par Djamil Dehlavi. Un décor dépaysant qui tranche, à n’en pas douter, avec les habituels cimetières indiens et autres banlieues tranquilles abritant moult boogeymen.

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Vij – Copyright Artus Films 2020

Nommée ves en ricochets, une autre section du festival mettra à l’honneur des films méconnus qui ont pourtant influencé de nombreux cinéastes. Si Marée nocturne de Curtis Harrignton, superbe romance teintée de fantastique, sera l’occasion de voir un tout jeune Dennis Hopper, dans l’un de ses premiers rôles principaux, deux autres titres attirent notre attention. Œuvres oniriques et labyrinthiques, Le Carnaval des âmes de Harrold « Herk » Harvey et Dementiane pas confondre avec Dementia 13 de Francis Ford Coppola), de John Parker demeurent, plus d’un demi-siècle après leurs sorties, des objets filmiques radicaux et déstabilisants. Uniques longs-métrages de leurs auteurs respectifs, ils relèvent tous deux du cauchemar sur pellicule, abolissant toute logique narrative pour plonger tête la première dans un univers régi par ses propres codes, pas si éloignés du travail des surréalistes. Carnival of Souls passe ainsi du prétexte classique de la jeune femme perdue dans une ville inconnue, à l’exploration de sa psyché, traversée par des images indélébiles, à l’instar de cette valse frénétique accompagnée par un orgue sinistre. Dementia, quant à lui, explore l’inquiétante étrangeté chère à Freud, au travers d’un récit épisodique et muet, piochant dans le film noir et la culture jazz. Tombés peu à peu dans l’oubli, ils purent notamment compter sur David Lynch, fan de la première heure, ayant toujours revendiqué leur influence (évidente) sur son travail, afin de les réhabiliter aux yeux du grand public.

Le Carnaval des âmes – Copyright Artus Films 2017

Comme chaque année, le Cabinet de curiosités des Hallus sera l’occasion de se plonger dans des films méconnus, oubliés, voire victime d’une censure qui empêcha leur sortie. Parmi eux, Fondu au noir, petite série B de 1980 qui acquit un statut culte avec le temps. Réalisé par Vernon Zimmerman (dont c’est le dernier long-métrage), le film est une véritable plongée dans l’esprit d’un fan psychopathe, dévoilant le côté obscur de la force des images. Loin des geeks rigolards de Clerks ou de la figure tutélaire de Quentin Tarantino et de ses avatars, le cinéphile est ici une victime revancharde, usant de sa passion pour accomplir sa vengeance. Autre pépite bis quiprend le cinéma comme toile de fond, et VHS indispensable à tout bon vidéoclub du siècle dernier, Popcorn fait sans doute partie des œuvres précurseures à redécouvrir. Slasher méta et graphique, le film de Mark Herrier (scénariste de Porky’s, et ses suites) est à ranger aux côtés d’Angoisse de Bigas Luna, dans la catégorie des « anomalies » malheureusement encore trop méconnus. Après le succès de L’Important c’est d’aimer, Andrzej Żulawski est invité à revenir en Pologne afin de réaliser le projet de son choix, il sattelle entre 1976 et 1977 à une entreprise ambitieuse : Sur le Globe dargent, adaptation dune fresque littéraire de science-fiction, La Trilogie Lunaire, écrite par son grand-oncle, Jerzy Żulawski. À neuf jours de la fin du tournage, le nouveau ministre de la culture et chef du département cinéma Janusz Wilhelmi, percevant à travers ce récit une allégorie contre le totalitarisme, une œuvre dangereuse pour le régime, ordonne larrêt immédiat des prises de vue. Les décors sont détruits, un gigantesque trou est creusé afin denterrer les costumes, tandis que le cinéaste est fiché et interdit de travailler. Une dizaine d’années plus tard, à la suite d’un changement de régime, s’il ne peut tourner les vingt minutes qui lui manquent, il récupère les négatifs du film et commence le montage. Il tournera sans autorisation des scènes de rues et ajoute une voix off complétant les scènes manquantes. Une œuvre inachevée et démesurée, qu’il nous tarde de voir sur grand-écran. Les documentaires seront également mis à l’honneur au travers de l’exploration de la vie et la carrière de deux artistes majeurs du XXème siècle. Burroughs d’Howard Brookner se penche sur la figure de l’écrivain américain, auteur, entre autres, du Festin Nu; Crumb, signé Terry Zwigoff (réalisateur de Ghost World), s’intéresse quant à lui, à l’un des dessinateurs les plus importants de l’histoire du comic book. Enfin, le festival sera l’occasion de retrouver l’inévitable séance Film d’amour non simulé qui mettra à l’honneur un long-métrage coréalisé par une femme, fait rare dans l’univers du porno des années 80. Mascara de Roberta Findlay et Henri Pachard nous conte la relation entre Harriet (Lisa De Leeuw) et Lucy (Lee Caroll), une prostituée auprès de laquelle, la timide secrétaire va enfin assumer tous ses fantasmes.

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Sur le Globe d’argent – Copyright Malavida Films 2007

En plus de l’habituelle compétition de courts-métrages, le festival accueillera de nombreux invités parmi lesquels Marc Aguesse, responsable du site Catsuka, dédié au monde de l’animation (qui présentera Mind Game de Maindo Gemu); Fabien Mauro, co-créateur de la web-émission Toku Scope; Klaus Maeck, producteur de Decoder de Muscha (présenté dans le cadre du Cabinet de curiosités); l’illustratrice Delphine Bucher, qui dédicacera son premier livre Vandura Hotel : Alsaka, la dernière frontière; et enfin le critique François Cau, auteur, entre autres de la passionnante Histoire Orale d’Andrzej Zulawski. Une exposition de différentes œuvres de l’artiste Brulex complétera cette édition, plus que jamais attendue.

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Decoder – Copyright ‎ Vinegar Syndrome 2019

-> Programmation Complète

Informations Complémentaires

Cinéma Comœdia
13 avenue Berthelot, 69007 Lyon

PLEIN TARIF : 9,10€
RÉDUIT : 7€
ENFANT (- DE 14 ANS) : 4,50€
CARTE COMOEDIA 6 PLACES :
35,40 / 38,40€
SOIRÉE PROVOC ! : 10€
PASS INTÉGRAL FESTIVAL : 99,00€

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A propos de Vincent Nicolet

A propos de Jean-François DICKELI

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