Zoljargal Purevdash – « If only I could hibernate ».

If only I could hibernate est reparti bredouille du festival, où il concourait dans la catégorie Un certain regard, mais il remporte, en plus des suffrages d’un public conquis, une belle victoire: celle d’être le premier film mongol à se frayer un chemin jusqu’à Cannes. Le premier long métrage de la réalisatrice Zoljargal Purevdash, dont le titre était à lui seul une belle promesse, a été soutenu par le « Mongolian National Film Council and Mongolian Film Fund”, tout nouvellement crée, dont on espère qu’il fera rayonner un cinéma méconnu.

Une yourte aux marges d’Oulan Bator et de ses barres d’immeubles. C’est là que vivent misérablement une veuve, illettrée et alcoolique, et ses quatre enfants. Ultzii, l’aîné, est un petit surdoué de la physique; son professeur veut le présenter à des concours qui pourraient lui ouvrir les portes des plus grandes universités étrangères. Mais bientôt la mère repart pour la campagne, laissant l’adolescent en charge de la fratrie. Sa mission : veiller à sa survie lorsque le terrible hiver survient. Par tous les moyens, il lui faut trouver à chauffer la yourte. Le charbon, le bois, sont les nerfs de la guerre qui se livre contre les rigueurs du climat et de la société. Dans ce drame du froid, de l’abandon et de la pollution, qu’adviendra-t-il d’Utzii, dont la droiture et l’intelligence seront mises à l’épreuve par une vie dont nul, pas même les voisins, ne soupçonne les détresses? 

 

Sorte d’hybride entre Nobody knows et Will hunting, le film n’évite pas tout à fait les lénifiances de la success story mais il le fait avec grâce. Le regard caméra dont son héros nous gratifie le jour des résultats de son concours est une merveille de retenue. La simplicité du récit, la tendresse qui se diffuse dans le petit monde glacé de la yourte, la douceur du regard porté sur les enfants, tiennent à distance le misérabilisme social. 

Composée par l’ethnomusicologue Johanni Curtet, la bande-son souligne les tensions propres aux personnages et au pays: aspiration à la modernité de l’Occident, ancrage dans la tradition nomade orientale. Ainsi Ultzii se meut-il au rythme d’un tube de hip-hop plein d’énergie comme sur fond de“deepthroat singing”, ce chant de gorge pratiqué dans le région orientale dont il est originaire. 

Mêmes tensions entre les différents espaces: on navigue entre le monde clos, à la fois protecteur et mortifère, de la yourte, et la ville moderne où  la pollution le dispute à l’isolement mais où se situe l’école, clé de toutes les réussites. La campagne quant à elle représente tout ce qu’Utzii veut fuir. Aussi serait-il vain de chercher dans le film les dépaysantes beautés de la steppe. Elles saisissent pourtant dans un unique plan – un des plus beaux du festival- montrant l’adolescent, coiffé de sa toque mongole, évoluant derrière un rideau d’herbes sèches.

La terre de Mongolie est riche en métaux rares. On ne doute pas que son cinéma le soit aussi. 

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