Dès les premières séquences, le corps de Yoav occupe l’écran. Durant deux heures, il ne le quitte pas, faisant de Synonymes son terrain de jeu, son territoire. Du pays quitté et rejeté à celui qu’il veut sien, le jeune homme impose le tempo, faisant des ruptures de rythme un langage propre à traduire l’état d’ébullition qui l’habite.

Comme une tornade, l’acteur Tom Mercier provoque et structure la rencontre avec le long métrage de Nadav Lapid, son charisme imprégnant les mémoires par la fascination qu’il inspire. Magie du cinéma, miracle ? Dans la peau du personnage (l’expression prenant ici tout son sens), le comédien traduit par la gestuelle et le verbe les tourments de ce jeune Israélien en rupture dont la colère se nourrit d’optimisme : loin de se laisser abattre, il veut renaître, vivre pleinement, exulter.


© SBS Distribution

Les images se succèdent par flots, la caméra tentant d’épouser les bourrasques, se posant dans un coin, comme elle peut, là où elle trouve de la place, se faisant dicter sa conduite. Synonymes bouillonne, plonge en apnée, reprend sa respiration, se pose parfois, déroute sans cesse.

Les personnages croisés par Yoav, pantins articulés par d’obscures motivations, répondant à des archétypes auxquels il se frotte avec curiosité ou étonnement, font alors pâle figure et se raccrochent à un profil monolithe quand le jeune homme explose et déborde du cadre.

Les autres comédiens, comme ceux qu’ils incarnent, souffrent du contraste. Si certains tiennent tête (Léa Drucker et Christophe Paou notamment), d’autres perdent d’emblée le combat : avec leur jeu affecté (stéréotype de la diction et de la pause), Quentin Dolmaire et Louise Chevillotte ne parviennent jamais à exister au-delà de la caricature. Représentent-ils alors aux yeux du cinéaste une certaine «image de la France» ? Si oui, leur place dans la narration traduit la complexité et l’ambition du propos. Allant à l’encontre des portraits attendus, Nadav Lapid ne filme pas un match franco-isrélien mais une bataille contre les nationalismes, une quête de survie, un récit d’apprentissage heurté, inabouti, en perpétuel mouvement.

Ponctué de scènes inoubliables, troublant, déstabilisant, agaçant parfois, marqué par l’incroyable présence d’un acteur bigger than life, Synonymes joue suffisamment bien des coudes pour ne pas passer inaperçu.


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