Au plus fort de la canicule, une certaine indolence teintée de résignation aurait pu frapper le Capitaine et son équipage. Las ! C’est à la faveur de vents particulièrement favorables qu’une nouvelle moisson de nouveautés particulièrement aguicheuses déborde des cales de son rafiot. Alors que l’Humanité – dans un geste d’auto-sabotage quelque part admirable – convoque par tous ses moyens l’Enfer sur Terre, cette sélection apparaît tout à la fois terriblement vaine et absolument essentielle. A l’instar d’un mouillage sûr, la puissance que la musique confère se pose tel un dérivatif puissant pour supporter le fracas des bombes ou les morts tombés dans l’anonymat sur l’autel de la bêtise humaine.
Malevolence – Where Only The Truth Is Spoken
Certes, les cinq gars de Sheffield n’ont aujourd’hui plus grand-chose à prouver dans le paysage metal international, notamment après un Self-Supremacy (sorti en 2017) en béton armé. Ce nouvel album tonitruant leur permet d’asseoir une position dominante dans le metal hardcore, grâce notamment à un créneau qui n’appartient qu’à eux : une sorte d’équivalent de metal sudiste, mais du Nord de l’Angleterre et dans une version socialement engagée et urbaine, empruntant une bonne partie de ses codes au rap pur et dur. S’affichant comme une incitation à faire silence, Where Only The Truth Is Spoken prendra sans aucun doute toute sa saveur sur scène, tant il semble taillé pour y faire encore des ravages.
Sortie : 20 juin 2025
Vildhjarta – + där skogen sjunger under evighetens granar +
Moins connus que leurs compatriotes Meshuggah, les Suédois au cœur sauvage n’ont rien à envier techniquement au groupe de Jens Kidman, leur référence première. Mais finalement qu’importe l’expertise et le brio, tout cela pourrait rester froid, comme une masse inerte apte à combler les oreilles exigeantes de quelques passionnés fondus de musicologie. Ce que propose aujourd’hui Vildhjarta est très différent, comme une invitation à découvrir des paysages sonores toujours passionnants, déstructurés et sombres, à l’image d’une déambulation dans une forêt de sapins séculaires. Nul besoin de chimie pour participer au trip, les explorations de Vildhjarta dénotent d’une quête de transe et d’absolu, comme un ticket conduisant à peu de frais à un état de conscience modifié.
Sortie : 30/05/2025
Bask – The Turning
Tout droit issu d’une autre époque, sorte d’années 70 forcément psychés, Bask revient après III, album magnifique aussi mélodique que stoner, et quelques six ans d’un silence bien trop long. Si The Turning demeure dans la veine du rock gras, sacrément poilu même, comme tout droit descendu des Appalaches, assurément cela cache une complexité, une dissonance voire un inconfort rafraîchissant. Le groupe de la Caroline du Nord ne revient pas aux affaire pour proposer ce que d’autres font déjà, mais prennent des chemins de traverses attirants. Vêtus de leurs plus belles chemises à carreaux, les Bask se font guides d’un itinéraire psychédélique sans retour garanti.
Sortie : 22/08/2025
The Callous Daoboys – I don’t want to see you in Heaven
Dans un délire foutraque, sorte de concentré de rage folle mêlée de rock emo à la limite du débilidoïde, les Daoboys livrent ici une nouvelle galette surprenante et endiablée. Avec humour et dérision, le groupe braque son auditoire pour fêter dignement un monde dans lequel rien n’aurait de sens et où l’art serait relégué au rang de spectacle divertissant. Qu’à cela ne tienne, le quintet forme son propre musée, the Museum of Failures, sorte pied de nez aussi joyeux que désespéré où le grotesque côtoie le sublime, comme pour mieux s’extirper de codes esthétiques dénaturés. Ainsi la pop minaudeuse fricote avec le hardcore le plus brutal. Loin des posture un brin arrogante d’Igorrr par exemple, la musique des Callous Daoboys acquiert une cohérence et une profondeur certaine au fil des écoutes.
Sortie : 16/05/2025
Et en bref… Les patrons Berlinois de Der Weg Einer Freiheit font l’honneur d’un nouveau single Eos, toujours plus sublime, à la fois tourmenté et classieux, annonçant un prometteur – et néo-romantique ? – prochain album, qui sortira à la rentrée. Plus au nord, quelque part dans les forêts Norvégiennes qui ont vu naître le black metal, c’est le Witch Club Satan qui s’est réuni en AG pour commettre une nouvelle offrande avec un percutant Wildflower, à la fois obsédant, déchirant et véritable cri de colère aussi jubilatoire que misandre.
Comment passer outre un nouvel album de Deftones sous le titre de private music, lequel sonne de manière très fraîche pour ce qu’il demeure : un excellent souvenir des nostalgiques des 90’s. Depuis plus de 20 ans, Pelican ravi les oreilles du public avec un son post rock instrumental bien stoner et récidive ici avec Filckering Resonance, nouvel album démontrant que les Américains n’ont rien perdu de leur superbe. Toujours aux Etats – plus si – Unis, le projet « native » Blackraid continue sa route sur le sentier d’un combat sans issue possible, en faisant sonner des tambours de guerre toujours plus enthousiasmants avec ce single Wardrums at dawn on the Day of my Death, dont les riffs accrocheurs demeurent redoutables.
Adoptant une image médiévalo-post romantique charmante Draugveil se lamente avec un black metal tendance dépouillée et atmosphérique, somme toute mélancolique à souhait, dans son Cruel World of Dreams and Fears, exprimant un spleen désuet poignant. Puis, la singulière surprise Mawiza débarque avec l’album Ül tout droit issu d’un Chili pré-colonial encore pur. Le groupe chante en langue Mapuche avec un passionnant groove metal mêlé des transes locales. Dans leur quête de rythmes ancestraux, la présence de Joe Duplantier s’impose presque comme une évidence, tant le jeu du chanteur Landais reste emprunt de cette histoire sud-américaine. Enfin comment ne pas évoquer le prolifique Panopticon qui propose au coeur de l’été deux albums dédié au froid de l’hiver. L’un, Laurentian Blue, est purement folk et terriblement actuel, toujours emprunt de ténèbres et d’histoires très concrètes racontant une part d’Humanité, quand l’autre Songs Of Hiraeth, est davantage une collection de vieux titres évoquant des voyages, dont certains la Scandinavie.
La playlist suivante permet de retrouver une compilation de tous les groupes ou projets évoqué dans cette page (seulement sur Deezer) :
Bonne écoute !
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