Roger Avary – « Lucky Day »

Après une trop longue absence, Roger Avary est de retour… et il est en grande forme !.

Retour car c’est sa première sortie en salles d’Avary depuis l’excellent (et sous-estimé) Lois de l’Attraction, en 2002. On a hélas ! entendu parler lui, pour d’autres raisons que ses talents de cinéaste. En 2008, alors qu’il conduisait en état d’ivresse, le réalisateur a eu un accident de voiture qui a coûté la vie à l’un de ses amis présent à bord du véhicule. Condamné pour homicide involontaire, Avary a été en prison et libéré quelques temps plus tard pour bonne conduite… sous conditionnelle. Lucky Day est< inspiré par cet incident tragique tout en constituant une sorte de suite à son premier long-métrage, Killing Zoe (1994).

copyright Metropolitan Filmexport

Flashback : début 90s, Avary est le jeune auteur prometteur qui débute avec Quentin Tarantino avec qui il co-écrit Reservoir Dogs et Pulp Fiction, dont il reprend le scénario de True Romance (réalisé par Tony Scot) et produit par les fameux Frères Hadida*, qui deviendront ses producteurs attitrés, ainsi que ceux de Tarantino.  Succès de son premier long, très Tarantinien, Killing Zoe, puis il crée la surprise par son adaptation du best-seller de Brett Easton Ellis Les lois de l’attraction, meilleure transposition d’Ellis à ce jour, fourmillant d’inventivité et d’humour à froid. Puis, silence radio comme cinéaste. Il collabore à quelques scénarios. On le retrouve enfin via une série B de qualité, divertissante au possible et plus profonde qu’elle en a l’air, au vu de son sous-texte autobiographique. Le film démarre quand Red (Luke Bracey), un ancien braqueur de banque, sort de prison et retrouve sa famille après deux années d’enfermement. Collé à ses  basques, Ernesto Sanchez, son officier de probation -et collectionneur d’art !..- suit de très près sa conditionnelle et guette le moindre faux pas. Mais pire que Sanchez, il y a Luc Chaltiel, (Crispin Glover), tueur à gages psychopathe qui veut lui faire la peau dès sa sortie de prison… Red saura-t-il retrouver sa vie de famille avec sa femme et leur fillette ou va-t-il retomber dans les coups fourrés ?…Avec son rythme trépidant et son personnage hilarant de faux français, vrai psychopathe, Lucky day est avant tout un film hors du temps, renouant avec la série B dans ce qu’elle a de meilleur, un noble divertissement. Filmé comme un Comics sous speed, pop et rythmé, ses dialogues drôles et enlevés, emportent le morceau.

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A l’aéroport, le douanier demande au terrible Luc Chaltiel, la raison de son voyage : plaisir ou affaires ?
Les deux, réplique Chaltiel, le plaisir fait partie de mon business.
– Vous faites quoi ?
– Des plans retraite ! Sourit-t-il placide avant d’aller dégommer tout un bar.

Visiblement, l’inénarrable Crispin Glover s’en est donné à coeur joie dans son rôle de méchant over the top et nous aussi. Bracey arrive à créer un personnage attachant, dont on suit la trajectoire avec une attention douloureuse : replongea ou replongera pas ?     Lucky Day est bien plus original et sophistiqué qu’une simple histoire de retour à la « normale » après la prison, il fait mouche par son humour irrévérencieux et sa croyance en la fiction pop, entre BD et clin d’oeil insolents : ainsi le logo Fumer TUE inscrit en très gros sur le paquet de clopes ou encore son traitement irrévérencieux de l’art contemporain- Zoé (épatante, Nina Dobrev), la femme de Red est artiste… En dire plus serait gâcher le grand plaisir que distille le film.


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Ce qui fait le charme, certes, modeste mais indéniable de Lucky Day c’est son aspect vintage, sa croyance en la fiction pop et sa faculté à s’amuser avec ses  personnages et donc, avec le spectateur. Et aussi, mine de rien de distiller une émotion plus souterraine.

* Les frères Hadida défendent un cinéma extrêmement diversifié, de divertissement et de qualité, allant des Hunger Games à It Follows (2014), en passant par Le Loup  de Wall Street, Reservoir Dogs… ; ils sont distributeurs via leurs société Metropolitan Filmexport. Samuel Hadida est décédé l’an passé, Victor continue à se démener pour une cinéma indépendant et singulier tel Lucky Day.

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