Dans un monde alternatif meilleur, Cyberpunk 2077 est bien sorti le 16 avril 2020 comme initialement prévu, faisant en sorte que le premier confinement passe pour nombre d’entre nous tel une parenthèse enchantée où tout aurait concordé pour nous obliger à rester amoureusement menotté au pad et autres clavier-souris, sans avoir à répondre à la moindre injonction du monde extérieur. Mais voilà, nous sommes le 22 novembre 2020, le jeu-monstre de CDProjekt n’est toujours pas sorti et nous en sommes à notre deuxième confinement. La vie est décidément mal faite.

Alors plutôt que de revoir pour la 30ème fois Blade Runner, en manque d’esthétique dystopique, on fouille dans notre bibliothèque vidéoludique, on écume les boutiques en ligne de jeux dématérialisés à la recherche du moindre argument scénaristique avançant une sombre histoire de trafic d’implants transhumanistes et d’I.A. devenues folles. Et on tombe sur ce Hard Reset Redux par hasard, qui plus est soldé. Bonne surprise ou vieux machin rouillé ?

Sorti en 2016, Hard Reset Redux est une relecture d’une première version du jeu datant de 2011. Relecture puisque, plus qu’un simple remaster upgradant des graphismes vieillissant, ce Redux n’est pas non plus un réel remake revoyant de fonds en comble sa copie. Quelque part, presque malgré lui, Hard Reset Redux est un prototype : entre deux eaux, il ne change pas sa charpente, mais ravale sacrément sa façade en ajoutant notamment une mécanique de gameplay apparemment absente du jeu initial : le dash, un mouvement d’esquive ultra-rapide que l’on peut effectuer dans n’importe quelle direction, à tous moments et joyeusement enchaînable.

Dans les villes de grande solitude…

Je ne vais pas vous mentir, je n’ai jamais joué à la version initiale de Hard Reset. Mais j’ai définitivement du mal à concevoir que cette première version puisse se passer d’une telle mécanique. C’est simple, en combat, je n’utilise pour me déplacer quasiment que ce petit mouvement, déclenchable d’un coup de gâchette et permettant autant de s’extirper fissa d’un guet-apen de robots-crabes suintant l’huile de moteur bon marché que de contourner un pseudo-ED209 énervé pour mieux atteindre son point faible. Je plains sincèrement les joueurs de 2011 tant cette mécanique apporte un sentiment grisant de légèreté à un jeu qui ne s’en encombre pas. De légèreté.

Car Hard Reset Redux est un FPS, un “First Person Shooter”. Soit un jeu de tir à la première personne nageant dans un jus particulièrement old-school : pas de système de couverture, aucun répit, et une I.A. très basique qui voit le moindre ennemi se précipiter vers vous tel un candidat au suicide cocaïné. Bref, peu ou prou la recette établie par un certain DOOM dans les années 90. Et c’est à l’évocation, justement, de DOOM que l’on touche aux limites de Hard Reset Redux. Il faut savoir que la même année que ce Redux sortait le reboot de DOOM. Encore une relecture d’un concept solidement établi et difficile à ébranler sur ses acquis tant la formule est laconique : des niveaux plus ou moins labyrinthiques, des monstres, des flingues.

Les quelques boss croisés sont assez spectaculaires.

Et pourtant, DOOM 2016 réussissait sacrément son rafraîchissement, proposant un gameplay gorgé de petites mécaniques intriquées qui en faisait une sublimation du genre. Ici, le gameplay reste plaisant, mais sans réel intérêt à creuser. Un simple exemple : Hard Reset propose une dizaine d’armes différentes, mais j’ai traversé tout le jeu en en utilisant que deux. Inconcevable dans DOOM qui nous intime l’ordre de bien choisir l’arme en fonction de l’ennemi affronté sous peine de sanction immédiate. Et puis DOOM 2016 possède un sens de la mise en scène étonnant qui manque cruellement à Hard Reset Redux. DOOM se présente comme un plan-séquence seulement interrompu par des temps de chargement. Un procédé qui permet une immersion totale et parvient à rendre intéressant les quelques scènes sans gunfights du jeu, ces scènes où les scénaristes tentent même – et avec succès – de développer l’argument narratif du jeu. Car le plus surprenant avec DOOM 2016 est qu’il a une véritable bonne histoire !

Pour résumer, DOOM 2016 est un conte faustien et éco-responsable où l’humanité, afin de résoudre ses problèmes d’énergie, a trouvé le moyen d’aller aux Enfers pour y spolier les ressources locales. Et bien sûr, rien ne se passe comme prévu. Oui, je sais, dit comme ça… Mais DOOM raconte son histoire d’une façon qui n’appartient qu’à lui, brillante, enlevée, en s’autorisant même des élans de dérision particulièrement savoureux quant à sa nature de shooter ultra violent. DOOM 2016 est un jeu intelligent.

Electricity / Nuclear and HEP / Carbon fuels from the sea / Wasted electricity

En ce qui concerne l’histoire de Hard Reset Redux, j’avoue tristement que je n’y ai rien compris. Je suis pourtant rompu aux histoires tordues et aux thèmes développés par l’univers du jeu. Mais voilà, les cut-scenes du jeu sont littéralement lamentables. Tout est infiniment mal raconté, mal mis en scène. Je serai bien en peine de vous résumer ne serait ce que le simple point de départ du jeu.

Pour autant, Hard Reset Redux n’est pas complètement à jeter aux oubliettes. Il a pour lui un sens du déplacement (ce dash précédemment évoqué) qui en fait un jeu plaisant à parcourir. Il me reste, comme souvenirs, des instants de ballet mécanique à la pyrotechnie spectaculaire, et quelques flashs de fureur enjouée. Mais rien qui n’aura jamais réellement gommé ce profond sentiment de mélancolie qui m’étreint quand je pense qu’il va falloir attendre encore plus de deux semaines avant de pouvoir plonger dans Cyberpunk 2077

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