Écrans Mixtes – 14ème édition du 6 au 14 Mars

Dans moins d’une semaine débutera la 14ème édition d’Écrans Mixtes, pour neuf jours de festivités et quatre-vingt séances proposées dans une trentaine de lieux de la métropole lyonnaise. Plus gros événement cinéma local du premier semestre, cette nouvelle édition s’annonce assez excitante.

Gros coup pour l’ouverture avec l’avant-première (un mois avant sa sortie française) de Drive-Away Dolls d’Ethan Coen. Deux ans après les débuts en solo de son frère cadet Joel sur The Tragedy of Macbeth avec Denzel Washington et Frances McDormand, l’aîné vole de ses propres ailes ou presque. En effet, le projet a été conçu en étroite collaboration avec sa femme (également sa monteuse) Tricia Cooke et devrait constituer le premier volet d’une trilogie (Honey Don’t va suivre) hommage à Russ Meyer (le cultissime Faster, Pussycat! Kill! Kill! en tête). Il a embarqué dans cette aventure Margaret Qualley qui tient le rôle principal au sein d’une distribution hétéroclite dans laquelle se croisent Pedro Pascal, Matt Damon ou encore Miley Cyrus. S’il retrouve son fidèle Carter Burwell à la bande-originale, il collabore pour la première fois à l’image avec l’excellente Ari Wegner (The Power of the Dog, In Fabric, The Wonder)… Bref, on a hâte de voir le résultat.

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Drive-Away Dolls – Copyright 2023 Focus Features. LLC.

En guise de clôture, le réalisateur Sébastien Lifshitz a choisi pour sa carte blanche Happy Together de Wong Kar-Wai. « C’est comment Hong Kong à l’envers ? » : une pensée intime, audible en voix-off occasionne instantanément l’une des nombreuses visions fulgurantes et indélébiles propres au cinéaste, dans un long-métrage préfigurant sa consécration à venir sur In The Hood for Love. Avant sa célèbre romance avortée, il filmait la fin de celle unissant deux amants, Lai et Ho ayant quitté Hong-Kong pour l’Argentine. Délocalisé WKW, trouvait sa forme finale, celle qui allait faire de lui l’un des stylistes les plus influents du début de XXIème siècle mais aussi l’un des plus grands auteurs de la scène internationale.

Sebastien Lifshitz, invité d’honneur de l’édition, a droit une rétrospective composée d’une dizaine de ses travaux. Un cinéaste à la fois reconnu et méconnu, actif depuis trois décennies, ayant débuté dans la fiction avant de connaître une forme de consécration dans le documentaire. Cet hommage sera l’occasion de découvrir un pan « oublié » de son œuvre. Des courts Les Corps ouverts et Les terres froides aux longs Presque rien ou Wild Side et peut-être les remettre en perspective avec les projets qui suivront. Les Invisibles, pour lequel il avait été récompensé d’un Cesar du meilleur film, sera projeté, ainsi que le très apprécié Petite Fille ou Bambi, une nouvelle femme. À noter, que sa nouvelle réalisation Madame Hofmann, aura droit à sa séance en avant-première, Lifshiftz y suit Sylvie Hofmann, une infirmière qu’il a suivi durant la crise du coronavirus. Une femme au crépuscule de sa carrière, en première ligne, qu’il observe, écoute, regarde.

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Madame Hofmann – Copyright AGAT FILMS – ARTE France – 2023

Autre hommage, celui que rendront les Écrans Mixtes à Derek Jarman trente ans après son décès. Figure majeure de la culture queer passée par le clip (il a mis en images les Smiths, les Pet Shop Boys, Marianne Faithful…) avant de débuter dans le cinéma underground avec Sebastiane (projection le dimanche 10 mars à l’Aquarium Café) en 1976 et construire une œuvre récompensée à plusieurs reprises, il reçu notamment l’Ours d’argent à la Berlinale 1986 pour Caravaggio. C’est sur ce film qu’il révéla Tilda Swinton qui devint sa muse et repassa devant sa caméra pas moins de huit fois. Six films sont au programme, parmi lesquels le fascinant Edward II adaptation postmoderne de la pièce de Christopher Marlowe.

Sebastien Lifshitz préside le jury chargé de décerner un prix à une compétition internationale inaugurée en 2022. Ils devront trancher parmi huit films dont le très prometteur Green Night. Xia, rigoureuse agente de sécurité à l’aéroport de Séoul, voit son quotidien bouleversé après avoir contrôlé une jeune femme aux cheveux verts tentant de faire passer de la drogue. Ces deux solitudes vont s’unir pour affronter la dangerosité des bas-fonds de la capitale coréenne. Un polar hong-kongais féminin et nouvelle génération signé Han Shuai, remarquée pour son premier long, Summer Blur. Egalement en compétition, Fainéant.e.s le nouveau documentaire de Karim Dridi ou encore l’intriguant Sofia Foi de Pedro Geraldo, que l’on compare au Gus Van Sant post-Elephant. Tous les cinéastes de la compétition seront présents pour accompagner leurs films.

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Rosalie – Copyright Marie-Camille Orlando – 2023 TRESOR FILMS – GAUMONT – LDRPII – ARTÉMIS PRODUCTIONS

Coté Panorama, pas moins de treize avant-premières et inédits. Rosalie de Stéphanie Di Giusto (La Danseuse) avec Nadia Tereszkiewicz et Benoit Magimel, retrace l’histoire de Clémentine Delait, une femme à barbe avant accédé à la célébrité au début du XXème siècle. Outre le sujet et le casting, la jeune réalisatrice qui avait collaboré à l’image avec Benoit Debie sur La Danseuse, occasionnant quelques belles envolées esthétiques, s’associe cette fois-ci avec Christos Voudouris, connu notamment pour avoir signé la photo d’Alps de Yorgos Lanthimos. Elle s’intéresse de nouveau à une figure féminine pionnière, puisque sa Rosalie est librement inspirée de Clémentine Delait. Une tenancière de bar qui fut la première femme à devenir célèbre pour la barbe qu’elle portait.

Quatre ans après un Dirty God plutôt intéressant, Sacha Polak retrouve la comédienne Vicky Knight mais aussi Esme Creed-miles qu’elle a déjà dirigé sur la série The Doll Factory, à l’occasion de Silver Haze. Un drame social et sensuel, libre (l’improvisation a une eu une part importante dans la conception du film), réaliste et poétique, qui vient se poser aux confluents de divers courants pour imposer sa propre personnalité.

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Rotting in the Sun – Copyright Mubi 2023

Cinéaste chilien s’exerçant principalement aux USA, Sébastián Silva est un nom identifiable du cinéma indépendant américain quasi inconnu hors de ses frontières. Il a pourtant été plusieurs fois primé à Sundance, a fait tourner des acteurs appréciés tels que Michael Cera ou Kristen Wiig, écrit une mini-série avec Colin Firth et Toni Collette… Ajoutons à ce CV cinéma, d’autres talents artistiques puisqu’il est également peintre et musicien, tout cela en fait une individualité singulière. Sa dernière (et possiblement sa meilleure) réalisation, Rotting in the Sun, auto-fiction tragicomique tantôt irrésistible, tantôt inquiétante et tout du long excitante, est disponible depuis le mois de septembre dernier sur la plateforme Mubi. Le festival donnera l’occasion aux spectateurs lyonnais de l’apprécier sur grand écran. Ça vaut vraiment le détour !

Plusieurs autres événements devraient marquer cette édition. Notamment une soirée Cruising in New York City Inferno qui proposera un double programme formé par le polar de William Friedkin et le film pornographique longtemps disparu de Jacques Scandelari, dans une copie réalisée d’après une VHS. La séance sera fera en présence du directeur de la photographie du film François About. Une journée à la maison de la danse qui se conclura pas la projection de Cabaret de Bob Fosse, un hommage à Patrice Chéreau, une section nouvelle section baptisée Queer Cultes… Il y en aura pour tous les goûts cette année encore. La pluralité des cinémas LGBTQIA+ passés et présents est plus que jamais représentée !

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A propos de Vincent Nicolet

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