« J’ai la patience du chasseur qui attendrait dans l’ombre…. »

Rescapé d’entre les mots. Avec un nom à l’écriture qui fait référence au « Questlove » du  mythique batteur de The Roots, nous entrons bien dans le hip hop, mais pas seulement. La prose urbaine et sombre des morceaux est sans concession à quelques autres tendances que ce soit. Il pleut de l’acide et on rêve de moutons électriques . L’ambiance est noire, mais la lumière n’est-elle pas la même qui nous aveugle ou nous éclaire ?

« Le regard frondeur de Joe Strummer ». Je ne sais pas pour vous mais lui, ça va. Alors du coup, nous voilà rassuré. D’entrée de jeu, ce gars nous parle sans filtre, cash à la Kalash, bien avant de devenir Viktor Koup ?k….

Les oreilles se tendent et se tournent. Tiens, on parle de moi ou je rêve ? Car c’est là l’une des forces de ce morceau et de tout ce qui vient de cet artiste : supprimer toute distance entre le morceau et l’auditeur. La magie, argile d’une voix qui devient celle de son auditeur. Je croyais ne plus jamais me sentir aussi proche des paroles d’un morceau et la voix qui s’adresse à moi me soulève encore dusse-je y laisser mes dernières plumes. Car c’est un cri de libération qu’assène l’album. Une rage ontologique.

Alors racontez-moi :

Vasken Koutoudjian : J’ai commencé à te connaitre comme Kalash, et tu m’as renversé avec un morceau : Jouer le jeu. Alors le bonheur nécessite toujours beaucoup de conditionnement ?

Viktor Koup?k : Ahahah, a part en ce moment parce qu’il faut reconnaître qu’après quelques années de labeur, sortir ce bel album me rend plutôt heureux. Mais sinon oui, cette phrase reste d’actu.

VK : Qu’est ce qui te motive à continuer à faire de la musique ? Qu’espères-tu de ta vie ?
V : La passion, la scène, le plaisir de créer et de tourner avec les Haters. Un besoin d’évacuer quand la pression intérieure est trop forte, quand la violence de ce monde est trop insupportable, un besoin de fantasmer, de transgresser la réalité.

VK : Comment es-tu venu à faire de la musique ? Quel est ton parcours depuis le milieu dans lequel tu as grandi jusqu’à aujourd’hui.
V : J’y suis venu par la rage adolescente naïve, conne parfois, mais excitante. J’y suis venu beaucoup par le rap, pour le rap. On s’est éclatés plusieurs années dans l’aventure Hip-Hop kalashienne avant que ce soit plus aux forceps. Et réellement depuis le début des aventures Viktor Coup ?K et maintenant Viktor & The Haters, je prends énormément de plaisir à zigzaguer entre le rap, le punk et l’électro.

VK : Ici ça brûle, il n’y a qu’à sortir dans la rue aujourd’hui (manifs) pour le voir. Qu’est ce qui pourrait éteindre l’incendie d’après toi ?
V : Que Macron dégage pour commencer, mais ça ne suffira pas. Le libéralisme sauvage est voué à s’auto-détruire, mais en attendant, il détruit tellement de vies. Du fonctionnement de notre démocratie à la répartition des richesses, du racisme systémique aux guerres sociales menées par les quelques gagnants du schéma actuel, il y a tellement de points à revoir pour éteindre l’incendie. Il faut peut-être que ça brûle vraiment avant, pour se mettre à reconstruire.

VK : Je t’ai connu comme Kalash, qu’est ce qui a fait cette transformation ?
V : Kalash était un groupe, Jack Mes & moi. Un groupe dans sa plus petite et intense formation, un binôme de meilleurs amis, de frères. Cette transformation est principalement due à l’envie qui s’impose à un moment donné, de ne plus traîner, et de réaliser à 1000% sans transiger sur aucune direction artistique. Une quête de liberté totale même si c’est utopique. Aujourd’hui ma musique a des défauts, mais c’est ma musique. L’esthétique exacte à laquelle j’aspirais. Il faut du temps pour se connaître et comprendre ses fonctionnements. Le solo entouré des Haters passionnants. Garder le Final-Cut tout en laissant la place à la créativité folle de ceux qui m’entourent. C’est une formule que je ne suis pas près d’abandonner.

VK : Comment as-tu rencontré Otchakowski ( et qu’apporte-t-il ? (je l’ai connu dans le trio du coup j’aime comprendre les connexions)
V : On s’est connus via une association chérie que j’ai participé à créer, La Sierra Prod. C’est le frère de cri Kohndo qui nous a connectés. On a mené énormément d’ateliers musicaux ensemble, bu pas mal de coups, beaucoup échangé, et quand j’ai revu la formule Live pour défendre le premier album, il s’est affirmé comme une évidence dans le Band. J’adorais justement ce qu’il faisait avec le trio et son utilisation du Looper, pour récréer plein d’instruments et de textures vocalement. Il a aussi participé à la compo d’un titre « Bitch » et on se retrouve à fond sur l’amour de la Noise et de l’énergie pure. Et je découvre de plus en plus que c’est un super Mc et un putain de Backer. Bref, un gars talentueux.

VK : Comment se passe le processus d’écriture chez toi ? Quelles conditions te sont nécessaires ?
V : J’en parle dans un texte que je n’ai pas encore sorti, qui traite justement de l’écriture. Jeune j’écrivais comme on pisse au lit, maintenant c’est devenu une affaire de vie ou d’mort. C’est parfois compliqué de m’y mettre. Je sais trop ce qui va en découler, que je vais devenir relou, que je vais m’inventer des ailleurs, me cogner au réel. Heureusement, j’écris principalement sur la musique et certaines grosses prods impulsées par exemple par un Ossama, ou un gros riff de Sir Hill, ou un de mes multiples bidouillages, me mettent assez en transe pour tenter de sublimer la crasse intérieure et extérieure. Sinon les conditions sont : la déprime, l’alcool, la solitude, le son à fond, les bistrots, les fantasmes, les discussions entre potes, les larsens, les Subs qui font trembler les murs, les textures qui piquent, les caisses qui claquent comme des portes à la gueule des cons.

VK : Plus que jamais le temps est maussade comme tu dis. Dans quoi vois-tu un espoir de vivre ensemble dans une société apaisée et non plus à baiser ?
V : Baiser ce n’est pas dégueux déjà. Comme je te disais plus haut, je ne suis pas follement optimiste sur le vivre ensemble dans cette société. Disons que les conditions ne sont pas vraiment réunies. Si j’oublie un peu ces conditions, mon immense espoir va dans l’enfance et la jeunesse que je côtoie énormément et que je trouve incroyable. Le problème reste que l’Etat ne fait absolument rien de sérieux pour eux.

VK : Donne-nous un morceau (pas de toi) qui te ferait partir en guerre. Un pour faire l’amour, un pour
V : Je partirais bien en guerre avec un track vénère de punk genre « Chaos In My Life » de The Exploited et pour l’amour bien-sûr Marvin Gaye « Let’s Get It On »

VK : La réponse à la souffrance est dans le corps d’une femme sembles tu dire dans blackout. Si tu avais le pouvoir de redonner les cartes dans le jeu de société, tu leur donnerais lesquelles (aux femmes).
V : Toutes les cartes. On a essayé avec les hommes pendant des millénaires, ça n’a pas l’air convaincant. Plus sérieusement, déjà, les mêmes cartes dans le jeu que les hommes ce serait un bon début, le truc qui s’appelle l’égalité, et qu’on n’applique jamais.

VK : Quels sont tes projets ?
VK : Mon projet numéro 1 est de planter le drapeau « Blackout (I)» le plus haut possible, et qui sait préparer ensuite rapidement la sortie d’un 2ème volet ! J’ai quelques projets en acronymes sinon, dont je ne révèlerai bien évidemment pas le sens= ATVFE xxx GFQTLP xxx VATH (le dernier, j’espère que vous l’aurez capté !)

Quelques questions à Raphaël Otchakowsky, qui fait partie du groupe et que j’ai connu il y a quelques années dans le Trioskyzophony Microphone Club.

VK : Je t’ai connu dans le Trioskyzophonik Microphone Club, tu as donné de la voix avec Maryna Voznyuk, aujourd’hui tu œuvre avec Viktor and the Haters, quel est le fil conducteur entre toutes ces musiques ?
Raphaël Otchakowsky : Le fil conducteur de ma carrière c’est que je veux progresser toute ma vie et que je m’emmerde à une vitesse folle. Sachant que pour progresser il faut être patient, je te raconte pas le paradoxe. Ensuite j’ai rencontré Viktor grâce à LaSierraProd une association de quartier de Paris XVIII à côté de la porte de Clignancourt qui propose aux habitants de 8 à 250 ans, chaque année la création d’un triptyque écriture/musique/vidéo avec concert à la fin. Mon rôle dans le groupe est un petit peu le Viktorinox mon dieu ce vilain jeu de mots. Je Back essentiellement, je balance des boucles vocales avec ma Loopstation rc 505 je fais du beatbox.
Ensuite par rapport aux réflexions qu’amène le groupe je dirais qu’il y a une poétique sombre et joyeuse
Une envie de mettre en lumière les paradoxes de notre temps
Et le morceau que je mettrai en avant c’est « collision ».


https://viktorandthehaters.bandcamp.com/track/collision
https://www.facebook.com/ViktorAndTheHaters/


Viktor et ses Haters prochainement près de chez vous

  • Val Thorens-Wild & Savage(10/01)
  • Bagnolet-La Belle Maison (18/01)

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A propos de Vasken Koutoudjian

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