Sortis respectivement en 1999 et 2001, Running Out Of Time de Johnnie To et sa préquelle Running Out Of Time 2 (co-réalisée par Law Wing-Cheong) sont désormais disponibles en Blu-Ray dans un combo édité par Le Chat Qui Fume.
Portés par Lau Ching-wan, les deux films suivent l’acteur dans la peau de l’inspecteur Ho Sheung-sang, négociateur hors pair, à chaque fois aux prises avec un malfaiteur brillant.
Running Out Of Time
Dans le premier volet, ce criminel prend les traits de Cheung (interprété par Andy Lau). Cancéreux en phase terminale – il ne lui reste que 72 heures à vivre – celui-ci jette son dévolu sur Ho, invitant l’inspecteur à tenter de l’arrêter avant qu’il ne se venge d’une bande de mafieux…
Centré sur le jeu du chat et de la souris auquel s’adonnent Ho et Cheung, Running Out Of Time frappe d’abord par la qualité de son écriture et de sa mise en scène – la promesse initiale du scénario, impliquant que l’action se passe en un laps de temps restreint, insuffle au produit fini un rythme effréné que maintiennent un découpage et une réalisation des plus efficaces – mais séduit également par sa lecture avisée du genre dans lequel il s’inscrit. En effet, outre l’alchimie évidente entre Lau Ching-wan et Andy Lau, la réussite du film tient au parti-pris assumé de traiter l’affrontement entre policier et criminel comme la confrontation des deux faces d’une même pièce, jusqu’à transformer ce rapport symbolique – en lui-même assez classique dans le genre du polar – en relation quasi-amoureuse.
Ponctué de traits d’humour aussi bienvenus qu’inspirés, le film joue ainsi de cette ambiguïté, aussi bien en la soulignant directement – par l’intermédiaire d’un personnage interrogeant le héros sur sa vie intime ou lors d’une jubilatoire scène de travestissement – qu’en mettant en avant les points communs entre les deux protagonistes. Solitaires (ce que met particulièrement en avant la rencontre d’un personnage féminin tiers incarnant la vie normale que le destin leur refuse) ceux-ci sont également unis par leurs obsessions respectives, similaires mais divergentes, à savoir la soif de justice pour Ho et celle de vengeance pour Cheung. S’affrontant au nom de la défense d’un « idéal » au détriment de l’autre, mais aussi et surtout par amour-haine – et prenant visiblement un malin plaisir à cela – ce duo à la fois comique, touchant et en définitive, tragique, fonctionne enfin car ses deux membres s’avèrent condamnés, l’un à mort et l’autre à combattre sans fin le crime, donnant lieu à une fin surprenante, ouverte et profondément poétique, laissant notamment voir qu’aucun de ces deux héros n’a, malgré les apparences, le monopole du coeur.

Copyright Le Chat Qui Fume
Running Out Of Time 2
Censé se dérouler avant son prédécesseur, Running Out Of Time 2 en reprend les grandes lignes – quitte à adresser quelques clins d’oeil au spectateur pour mieux lui faire accepter le peu de différences entre les deux longs-métrages – pour un résultat moins singulier mais toujours extrêmement efficace. On y retrouve l’inspecteur Ho à la poursuite d’un voleur facétieux – mais bien-portant cette fois – décidé à extorquer de l’argent à une femme d’affaires.
Mis en scène avec autant de soin que le premier opus – la seule différence notable tient à la photographie, plus colorée que dans le film précédent – ce second volet, s’il délaisse totalement les sous-entendus homoérotiques, demeure intéressant en cela qu’il permet à ses auteurs de réitérer l’ensemble des réflexions présentes dans Running Out Of Time autour du rapport entre justice et morale – grâce notamment à l’altruisme « à la Robin des Bois » dont fait preuve le voleur, faisant ressortir les travers de la société que sert le héros – et, à travers cela, de la figure du justicier.
Plus seul que jamais, l’inspecteur Ho se trouve donc une nouvelle fois au centre d’une aventure où sa détermination à faire justice finit par prendre une tournure tragique, tant celle-ci se révèle utopiste et donc vouée à l’éternelle insatisfaction… sans qu’il soit pour autant capable d’y renoncer. Dissection en bonne et due forme de la solitude du redresseur de torts et du sacerdoce que représente la justice pour lui, Running Out Of Time 2 s’impose donc comme une préquelle réussie, tant en terme de divertissement que dans le portrait sans concession qu’il brosse de son personnage principal, toujours aussi attachant.
Divertissement de haut vol et réflexion passionnante sur le lien entre justicier et fauteur de troubles, le combo Running Out Of Time I & II est pour toutes ces raison (et bien d’autres encore) la promesse d’une double séance palpitante au coeur de l’action hongkongaise de la fin des années 90.
Disponible en Blu-ray chez Le Chat Qui Fume
BONUS :
• Hong Kong Stories, documentaire d’Yves Montmayeur (50 min)
• Interview archives de Julien Carbon et Laurent Courtiaud (22 min)
• Interview archive Johnnie To (12 min)
• Interview archive Lau Ching-wan (25 min)
• Interview archive Raymond Chong (27 min)
• Films annonces
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