Depuis peu on observe une nouvelle vague de cinéma fantastique qui, faute d’être novateurs, ont le mérite de traiter leur sujet avec soin. Si se contenter d’illustrer constitue de toute évidence les limites de ces œuvres, nous ne pouvons malgré tout que louer le retour d’un cinéma sérieux, sans second degré, sans l’esprit geek qui a tant nui à la représentation du fantastique et de la peur pendant ces 20 dernières années.

© Condor Films

C’est notamment le cas de The Room, film concept aussi prenant qu’un bon épisode de la Twillight Zone qui a le mérite de tenir en haleine jusqu’au bout. « The Room », c’est cette pièce imaginée par Christian Volckman qui exauce le moindre souhait qu’on y formule, celle-ci matérialisant, à travers la métaphore fantastique, l’idée schopenhauerienne du désir comme lieu de l’aliénation – puisqu’insatiable et toujours renouvelé.

Kate et Matt, un jeune couple trentenaire, arrivent dans cette belle maison. La première séquence archétypique nous l’indique : si celle-ci n’est pas hantée, elle pourrait les avaler d’une bien autre façon.

La pièce qu’ils découvrent est maladroitement dissimulée, à peine condamnée, la clé facile à trouver. Matt n’aura qu’à penser à une bouteille de whisky pour que son vœu s’accomplisse. Pris aux jeux, Kate et Matt réclameront toujours plus, jusqu’à ce qu’ils espèrent enfin devenir parents. Hélas, les cadeaux offerts par la pièce subissent les affres du temps à une vitesse folle dès qu’on les sort à l’extérieur de la maison. Et oui, la vie est périssable. Tenant dans leur bras, un bébé devenu petit garçon en quelques secondes, le couple est happé dans le cauchemar. Le film propose un scénario astucieux qui multiplies les péripéties et les chausses trappes dans un joli vertige d’illusions, où les fantasmes des personnages finissent par effacer les contours du réel. Le tourbillon est efficace, perdant le spectateur avec ses héros qui ne comprennent plus s’ils sont dans le réel ou coincés dans le rêve imaginé par un autre. Si The Room est une œuvre qui part d’un argument assez fou et mystérieux, la forme, trop classique, ainsi que l’esthétique léchée manquent singulièrement de mystère et de folie. N’est pas Richard Matheson qui veut, qui dans « Button, Button » (adapté magnifiquement par Richard Kelly dans The Box) parvenait à offrir en deux pages un condensé de fantastique et de réflexion sur la condition humaine. Christian Volckman manque en effet de modestie et échoue lorsqu’il cherche à être métaphysique.

© Condor Films

Il ne refera pas Solaris de Tarkovski. Il ne suffit pas de citer Nietzche ou d’appeler un personnage John Doe pour interroger le spectateur sur sa destinée, évoquer la peur de la mort, les dangers d’une vie dans le fantasme, ou encore les tentations d’une éducation en vase clos. Il lance des pistes, mais n’en fait pas grand-chose ou les traite de manière superficielle. Cependant The Room fait partie de ces œuvres agréables qu’on ne toisait pas si facilement dans les années 80, comme celles qui fleurissaient au cinéma Orient Express des Halles et qu’on se pressait d’aller découvrir avant qu’elles quittent les salles. Ne boudons pas notre plaisir, car il est bien là.

 

Le film est disponible en VOD sur les plateformes habituelles dont Orange, Itunes, MyTF1 et Canal VOD.

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