Tandis qu’au Sri Lanka, les Tigres de libération, organisation séparatiste lutte pour la création du Tamil Eelam, un État indépendant dans l’Est et le Nord du pays, à Paris, un groupe mafieux extorque des fonds aux membres de la communauté tamoule dans le but d’aider au financement de la guerre d’indépendance. Mikael (Lawrence Valin) , jeune policier d’origine tamoulaise se voit confier une mission d’infiltration au cœur du groupe de malfaiteurs. Pour son premier long-métrage construit comme le développement de son premier court-métrage éponyme, Lawrence Valin adopte le schéma classique du polar d’infiltration en réduisant, voire en évitant les attendus du genre. Dans son scénario qui brille par sa limpidité, Valin ne sur-écrit ni les surprises ni le suspens. Le réalisateur a suffisamment confiance en l’intelligence du spectateur et à sa connaissance de ce type de récit pour éviter d’en rappeler les enjeux. Ainsi, après une brève exposition sur l’importance d’une telle mission, seules de rares et très brèves apparitions des membres de la hiérarchie policière viendront rappeler l’urgence des résultats. De même, les situations périlleuses associées au double jeu du policier sont limités au strict minimum.
Ce sens de l’essentiel témoigne de la belle maturité du jeune réalisateur. De nombreuses ellipses permettent aux deux arches narratifs, le policier et le familial, lui-même dédoublé -celui de Mikael et son histoire familiale, et celui de la communauté tamoule- de progresser en se concentrant sur les enjeux humains et sociaux. Si le récit policier n’est pas bâclé, à l’instar des scènes d’affrontement et de poursuites rondement menés, il constitue davantage un appât pour un public « jeune » que la bande annonce exploite abusivement. Les aspirations les plus solides et singulières de Valin sont liées à l’intime ; les questions liées à la double-identité, à la volonté affichée de s’intégrer au pays d’accueil. Comprendre les évènements qui ont bouleversé l’histoire de son pays d’origine et nous ouvrir les yeux sur un drame humanitaire qui est loin d’être terminé. Sur ce dernier point, l’esprit synthétique du réalisateur se double d’une absence de didactisme et de parti pris affectif. Le portrait de la communauté évite également les écueils de l’exotisme et les clichés sur une jeunesse avide de reconnaissance par le biais des bandes organisées. Cependant, cette partie du casting constituée de comédiens amateurs sur joue quelque peu dans certaines scènes. A contrario, on est impressionné par le magnétisme et la placidité inquiétante dégagés par le parrain tamoul , Vela Ramamoorthy. Le jeu sobre de Lawrence Valin évite de mettre son « je » en avant. Devant et derrière la caméra, indubitablement son parcours mérite d’être suivi de près.
Lire également l’interview de Lawrence Valin.
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