Gustave Kervern /Benoît Delépine – « En même temps »

Attention ! Attention ! la nouvelle bombe du duo Kervern/ Delépine explosera sur nos écrans mercredi 6 avril, soit presque En même temps que le premier tour des élections avec un  président sortant qui use volontiers de cette locution.
Explosion de rire garantie, l’auteure de ces lignes a eu des crampes aux zygomatiques en découvrant le nouveau coup de dés- pas pipés du génial tandem.

Copyright Chloe Carbonel

Soit, il était une fois…
Non ! ras-le-bol de la non-parité, on va dire comme Frida, une des pétulantes pétroleuses du film :
Donc, elle était une fois, Béquet, un maire de « Centre Droite Extrême » (sic!)  et Molitor, son confrère écolo qui se retrouvent à la colle – au sens premier – par une activiste féministe, une colle girl. Tout ça la veille d’un vote pour entériner la construction d’un parc de loisirs à la place d’une forêt primaire…
Peut-être ne fallait-il pas s’aventurer dans ce bar à hôtesses nommé le F.M.I où la spécialité coquine est la « cravate du notaire »…

Mais s’aventurer dans le monde de Gustave Kervern et Benoit Delépine, oui, c’est une bouffée d’air ! Malgré et surtout la menace de centrale nucléaire, l’asphyxie ambiante galopante. Ils sont peut-être les seuls cinéastes actuels en France, capables de réconcilier ainsi cinéma d’auteur et grand public. Chacun de leur film a un vrai point de vue cinématographique, allié à une vision anarchiste et truculente, comme seuls des électrons libres tels (les regrettés) Jean-Pierre-Mocky ou Alain Jessua savaient le faire. Ou celui d’Otar Iosseliani, facétieux roi des plans larges stylisés.

En même temps, leur cinéma ne ressemble qu’à eux et nous ouvre un monde qui nous ressemble et nous rassemble. Nous, les marginaux, les excentriques, les doux dingues, les paumés. Ce qui n’exclue pas des gens de pouvoir, comme le génial tandem que forme Jonathan Cohen (Bequet) et Vincent Macaigne (Molitor), deux politiques perdus aussi. L’immense Cohen trouve un rôle sur-adapté à sa démesure ; lui seul pouvait rendre émouvant et sympathique un maire avouant « avoir flirté avec l’extrême-droite parce que c’est le parti où il y a le plus de blondes au mètre carré » !…
Il trouve un alter-égo épatant en la personne de Macaigne, rappelant le tandem inoubliable du Grand Soir, Benoit Poelvoorde et Albert Dupontel, dont Cohen et Macaigne seraient une version à priori installée et « upgradée ». Mais leurs repères sont fragiles, surtout quand ils croisent la route des Colle Girls menée tambour battant par une India Hair, plus naturelle et amusante que jamais entourée des non moins ad hoc Jehnny Beth et Doully.

Copyright Chloe Carbonel

A ce propos, Delépine avoue que le casting s’est déroulé sur le trottoir de l’Olympia avec tous les autres perdants des Césars ! Beautiful losers dont les apparitions mêmes brèves dynamisent/dynamitent le film : Laetitia Dosch, Yolande Moreau, Thomas VDB, François Damiens… Malgré sa propension redoutable à nous faire rire, le film reste – comme tous ceux du double trouble – éminemment tendre et humain, folie doucement radicale. A l’image de sa scène d’ouverture où sur fond de vitraux ornementés d’oiseaux, on entend les vocalises inouïes de Nina Hagen. Le morceau fin 70 s’intitule d’ailleurs Naturträne soit, littéralement les larmes de la nature.
Or, Macaigne/Molitor combat pour sauver des arbres…
Comme le disent les réalisateurs, c’est aussi « se mettre dans la peau » de l’autre, tout en essayant de sauver la sienne…

Le duo prouve que le rire peut être existentiel et qu’on peut faire en même temps, un cinéma frontal et délicat, pudique et humour Groland. Il arrive à partir d’une idée casse-gueule : deux frères ennemis politiques, collés de façon scabreuse, sans jamais tomber dans le vulgaire et surtout, avance droit devant, même si comme le reconnait Kervern,

le chemin a été très tortueux. C’est plutôt le GR20 que l’autoroute, quand on se décide à écrire un nouveau film.

Copyright Chloe Carbonel.

A quelques jours du premier tour électoral, nous votons haut la main pour le duo insolemment salutaire ou salutairement insolent, sauf que, trop libres et intelligents pour se présenter, Kervern et Delépine préfèrent filmer.
Courrez aux urnes et surtout au cinéma ! En même temps, l’un n’empêche pas l’autre… Dès le 6/04, une autre France est possible et visible. Merci à eux et à leur géniale troupe.

Amour ! Amour !

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A propos de Xanaé BOVE

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