Moi, ma grand-mère, Iliko et Illarion ( 1962 )
Un collier pour ma bien-aimée ( 1972 )
L’arbre du désir ( 1976 )
Le repentir (1984)

Malavida continue son exploration des cinématographies européennes, toujours un peu plus à l’Est, poussant cette fois jusqu’au Caucase et à la Géorgie. Bien qu’ayant remporté un grand prix à Cannes en 1956 pour L’âne de Magdana, Tenguiz Abouladze, un des plus grands représentants de son pays, n’a jamais atteint la renommée d’un Paradjanov ou d’un Kalatozov. L’édition de la dernière moitié de sa filmographie en quatre longs-métrages devrait faire enfin découvrir l’univers singulier de ce grand cinéaste à un plus grand nombre et réparer cette injustice.

 

Terre de poètes

Comme beaucoup d’artistes d’Asie centrale, son expression est marquée au sceau d’une culture traditionnelle. Le cinéma d’auteur qui va se développer en Géorgie sous l’ère soviétique est issu des traditions picturales orthodoxes (à l’instar des peintres d’icônes ou des toiles d’un Pirosmani ) ou des miniatures caucasiennes et orientales ( flagrant dans Achich Kerib et La légende de la forteresse de Souram de Paradjanov ), abstraites et non-naturalistes, où la présence unique du personnage est beaucoup plus importante que sa représentation. A contrario de la recherche de réalisme impulsée côté occidental à partir de la Renaissance, infirmation à l’Est contre affirmation à l’Ouest… Abouladze fait le grand écart entre ces conceptions, tant il s’inscrit dans la continuité des expérimentations formelles des cinéastes soviétiques ( montage des « attractions » ou rythmique ) qui sont la base des archétypes représentant la population soviétique. Mais il est également nourri et influencé par toutes les grandes œuvres du cinéma mondial et veut bousculer le langage classique par des collisions poétiques. Filer la métaphore, créer des rimes et enfiler des motifs, pour recomposer une culture vivante et organique. Un cinéma enchanté derrière son aspect naïf ou parfois foutraque…

Sa Géorgie n’est-elle pas la « terre des poètes » ? Ce cinéma polysémique est rempli de doubles sens et de symboles qui lui ont permis de préserver une relative indépendance et d’échapper en partie à la censure soviétique. Les films de Tenguiz Abouladze sont tous adaptés d’œuvres de la littérature géorgienne, à l’exception du Repentir. Pour Moi, ma grand-mère, Iliko et Illarion, il collabore avec Nodar Doumbadze, un scientifique, auteur de contes et qui se voue à l’écriture à partir de 1957. Ses personnages tragi-comiques lui sont inspirés par sa Gourie natale, une région de moyenne montagne qui s’étend jusqu’à la mer Noire. De caractères versatiles, ils aiment se disputer pour mieux se réconcilier en chantant, de préférence autour d’un verre… Ou le cliché du géorgien authentique ! Ce sont justement ces personnages stéréotypés qui vont permettre de jeter un regard à la fois critique et humoristique sur la vie en Géorgie soviétique. Akhmedkhan Abu-Bakar, célèbre écrivain du Daghestan, appartient lui à la même génération. Il publie d’abord des poèmes, puis son premier roman en 1957. C’est un romantique, qui puise dans des récits orientaux qu’il contribue à rénover comme pour ce Un collier pour ma Serminaz qu’il va adapter avec Abouladze. Au fil d’un scénario usant d’un chapitrage assez fantasque, Abu-Bakar et Abouladze pratiquent l’art de la fable ou de l’énigme ( celle de l’arbre et du fruit, dont la résolution vaut moins que la manière dont le sage en titre tranche la question ). Ils ressuscitent les vieux adages populaires, tel celui de la fumée, indissociable de la tête d’un homme véritable, et les coutumes villageoises. Parmi elles, le Koudekat, de simples bancs le long des murs qui jouent le rôle des arbres à palabre africains, où les vieux viennent commenter l’activité humaine, mais aussi et surtout, blaguer. Les auteurs savent rendre drôle et picaresque une tradition comme celle de la toque qu’il faut lancer par la fenêtre de celle que l’on veut épouser ou magnifier les arts du cirque traditionnel. Leur récit fourmille de détails sur cette culture djiguite que croise le jeune fiancé, auxquels la mise en scène d’Abouladze va trouver des traductions visuelles ( la boisson offerte dans cette longue corne de chèvre qui semble ne jamais devoir finir ). Enfin, L’arbre du désir adapte en une narration touffue, trois nouvelles du poète du début du siècle Georgui Leonidze, connu à la fois pour sa modernité et son attachement à sa culture natale. Au contraire d’autres cinématographies d’Asie centrale, Tenguiz Abouladze confronte ces récits ou structures narratives classiques au monde contemporain, la parabole à l’Histoire. Ainsi, on ne saisit pas toujours à quelle époque se déroulent les faits, plus particulièrement dans Un collier pour ma bien aimée où la Géorgie « éternelle » est confrontée au monde par le surgissement inattendu d’un camion ou la traversée d’une friche industrielle en plein désert.

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Un bijou de cinéma

Dans le cinéma d’auteur d’Asie centrale, le motif du tapis était parfois la seule trace d’image. Mais c’est plutôt une structure en collier qui définit le mieux le style narratif d’Abouladze, ainsi qu’elle est clairement énoncée dans Un collier pour ma bien-aimée. De tous ses films, c’est aussi le plus proche de Paradjanov, par une photographie remarquable de Lomer Akhvlediani, quand le ton et le propos diffèrent. Ici, le récit de voyage, dont le but premier est de ramener le présent le plus éclatant pour que les parents de la future acceptent le mariage, devient lui-même collier. Un assemblage où les rencontres et les péripéties s’enchevêtrent comme autant de perles enfilées sur le fil rouge du récit-cadre, dans l’esprit de la célèbre trame des Mille et une nuits. Hors les enfants le savent bien, une perle est une image à trois dimensions, un prisme à travers lequel ils peuvent regarder le monde. Quant à la répétition de certains motifs, elle n’a rien de tautologique mais a pour fonction d’ouvrir et de fermer les chapitres, puis le scénario lui-même, permettant à la boucle de trouver ainsi son unité. Chaque histoire contient autant d’éléments qui se rappellent à notre bon souvenir, les personnages se voyant en outre associés à un thème musical.

Plus généralement, Abouladze affectionne les mécanismes de comédie, comme le running gag du chien de Zouriko dont le destin tragique sert de substitut et de trait d’union aux amoureux de Moi, ma grand-mère, Iliko et Illarion. Certains dialogues sont répétés, acquérant le sens d’une prière, la force d’un mantra ( ce que le chien raconta à Zouriko ). D’où l’aspect disparate d’œuvres possédant leur propre unité diégétique. C’est comme s’il voulait / pouvait faire entrer la totalité du monde dans son film. D’où ce petit côté « catalogue de la Géorgie à l’usage du grand frère russe » mais pris dans un monde intérieur d’une franche liberté. Le collier d’histoires offert à Serminaz devient in fine « une histoire pour le cinéma », soit l’affirmation de sa modernité. Parti de loin, L’arbre du désir boucle aussi sa parabole tragique par une subtile variation du motif initial.

 

Une conscience cosmique

« La nuit, la lune, la neige et le vent.
J’erre dans le mauvais temps,
Je suis seul au monde,
Mes larmes coulent de bonheur.
Je ne dors, ni ne mange,
Je suis devenu fou. »
( Moi, ma grand-mère, Iliko et Illarion, 1962 )

Les structures incluantes des trois premiers films édités par Malavida, traduisent la philosophie d’Abouladze, orientée vers l’amour de son prochain, de la culture, du patrimoine, de la beauté et du vivant. Tout le contraire des arrangements claniques de Vedreba ( 1967 ) ou des décisions du chef du village de L’arbre… pour qui, seule compte la race. Cet amour jaillit dans la bouche du jeune Zouriko, en vers désordonnés, maladroits mais sincères.

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« Il y avait tout ça : la neige, le vent, la lune et le soleil. Le monde s’écroulait et j’étais heureux ». Sur la voix off de Zouriko, le jeune homme et son amoureuse courent dans la neige vers la vallée. Au-dessus d’eux, un paysage d’hiver villageois indéfini, presque idéel. Ce plan fait écho à un précédent, où seuls au monde dans l’étendue neigeuse d’un coteau, le garçon lui déclare sa flamme ( à sa manière saugrenue ). Zouriko adore tout autant sa grand-mère et ses «oncles », Iliko et Illarion. Pour Abouladze, comme pour son personnage, l’amour n’est complet que s’il englobe la totalité de son environnement. Ce que le personnage résume par une prière finale qui répond à travers les étendues géorgiennes, à celle de sa grand-mère agonisante.
« Je prendrai avec moi Iliko et Illarion et nous vivrons tous ensemble. Moi, Iliko, Illarion, et Meri. J’aurai beaucoup d’enfants, de petits-enfants et d’arrières petits-enfants, et encore leurs enfants, et nous serons le village entier. Puis on sera encore plus nombreux et nous serons le monde entier. Nous sommes le monde entier. Nous ne mourrons jamais, nous ne nous éteindrons jamais. Nous n’aurons jamais de fin. »
Dans Un collier pour ma bien-aimée, le scénario substitue aux mythes de création du monde ( une tortue noire, un buffle blanc ), la chaleur humaine, définissant une nouvelle cosmogonie, car « c’est là-dessus que repose la terre ». Dans L’arbre du désir, la séparation du couple provoque même une sorte d’apocalypse. Enfin, dans un style épistolaire assez ridicule, un camarade de classe de Zouriko a rédigé sa lettre d’amour qu’il définit comme «l’apothéose des plaisirs esthétiques ». Une phrase qui résume chez Abouladze cette recherche ontologique constante d’un langage qui traduise cet état d’ « être au monde ».

L’expression visuelle de Tenguiz Abouladze passe donc par la représentation de cette relation de l’homme à son environnement et à ses différents éléments : ciel, terre, eau, neige. Dès les premiers plans de Moi, ma grand-mère… sur Zourikho et son aïeule, sculptés en contre-plongée sur le firmament d’un gris azuréen, se retrouve cette force tellurique du grand cinéma russe dont il est l’épigone farfelu. Quand le narrateur annonce, goguenard, « on peut dire qu’on fait nos études ensemble », il étend son champ d’étude à l’univers tout entier. Après tout, la nature nous enseigne et à ce titre, les connaissances des anciens sont vitales. L’immensité redouble en outre la grandeur d’âme de ses habitants. Quant au départ en voyage de l’innocent Bahadour dans Un collier pour ma bien-aimée, il est magnifié par un reflet qui réconcilie eau, ciel, terre et protagoniste, l’endroit et l’envers. Il y a bien ici une mystique du paysage, au sein d’un cinéma qui foisonne d’invocations ( « Plut au ciel… » ) et prône même un véritable dialogue avec le macrocosme dans L’arbre du désir, car ainsi que l’affirme le jeune berger Guedia à son aimée qui elle, peut sentir le vivant, « La terre sait rire. Le ciel sourit avec les étoiles ». Dans cette vision poétique du cosmos, la rosée représente les larmes de la terre. Parmi les vers timides, presque catastrophiques, de Zouriko, les éléments naturels sont convoqués AVANT les humains. Ailleurs, un petit enfant court dans le vallon enneigé, innocent du drame qui va se jouer dans L’Arbre du désir alors que la colère du ciel gronde déjà sur leurs têtes et que le cortège final est condamné à s’étirer, fantomatique, entre les brumes et les vents.

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L’architecture humaine ( ville, village, église ) est considérée comme une partie intégrante du paysage. Cet incroyable village de montagne au début d’Un collier… s’étale verticalement, à la limite du tableau optique, géométrique mais sauvage, comme un gros essaim accroché à la paroi. L’absence de vues extérieures en toile de fond est au contraire flagrante dans Le repentir. Le film en devient vite étouffant, le tyran Varlam étant à la fois le centre et l’unique horizon. Il rompt également par sa présence, son culte de la personnalité, l’unité ancestrale du géorgien à son milieu. Ce sentiment d’appartenance à une terre-mère a largement favorisé le transcaucasisme défendu par Abouladze, mais qui miné par le régime soviétique, n’a tenu que sous sa férule. Paradjanov, arménien de Tbilissi, l’était de fait, sans le chercher. Impossible de savoir comment Abouladze a vécu les guerres interminables qui ont déchiré le pays puis le Caucase, une fois la souveraineté géorgienne retrouvée…

 

La richesse symbolique

Cette passion pour son pays d’origine polarise toute son œuvre. De nombreuses vues sont empruntées au néo-réalisme de ses débuts ou à une observation documentaire. La vie réelle fait ainsi irruption dans la fiction, les coutumes n’ont rien de folklorique mais témoignent de la diversité culturelle. Le héros-voyageur d’Un collier pour ma bien-aimée se rend dans le village de Balkhar, connu pour ses poteries exécutées exclusivement par les mains des femmes. Le début nous montre pourtant l’une d’entre elles pieds nus, affairée à piétiner une grosse motte de glaise pour l’attendrir. Et la multitude des gestes anciens, transmis à travers le temps. Caractéristique des géorgiens ( voir aussi dans une moindre mesure le Pirosmani de Chenguelaïa ), on chante et on danse à tout bout de champ. C’est la chorégraphie ivre d’Un collier… mais encore ce twist féminin qui vient défier les pas virils géorgiens. Et bien sûr montent de la terre même, les célèbres chants polyphoniques qui résonnent et jaillissent par la bouche de ses habitants. Tradition vieille de plusieurs siècles, elle a survécu à l’annexion de la Géorgie par les tsars, grâce à un gigantesque travail de transcription en notation conventionnelle.1 Une pratique qui fait office de lien entre ses habitants. Ainsi, lors de ses années d’université à Tbilissi, Zouriko partage avec ses amis des chants de différentes provenances. Un symbole que l’on retrouve individualisé et surtout étranglé dans la bouche de la camarade de Nana, d’où cette version atone et discordante de l’ Hymne à la joie dans Le repentir.

Une tradition de convivialité qui va de pair avec le culte du vin et de la vigne, tout aussi enraciné et dont les personnages font souvent usage. Un particularisme géorgien très apprécié, pour une production largement importée par la Russie. Un nectar adoré comme un trésor, que l’on a donc tout intérêt à enfouir dans un endroit secret. D’où cet arbre qui abrite la magnifique scène en silhouettes dans Moi, ma grand-mère…, tenue à bonne distance par une caméra qui immortalise ainsi l’amitié de Zouriko, Iliko et Illarion, qui sera d’ailleurs renouvelée et scellée encore une fois par le breuvage. L’arbre domine le cinéma d’Abouladze comme un de ses symboles les plus visibles. D’abord avec le célèbre arbre à souhaits ( aperçu plus récemment dans Depuis qu’Otar est parti de Julie Bertucelli ), qui recueille le fragile espoir final de L’arbre du désir, sous la forme d’un grenadier. L’arbre de vie est toujours synonyme de renaissance, particulièrement des histoires d’amour contrariées à la manière des contes tziganes ou de la poésie perse. Symbole d’amour, de vie et de fertilité, la Géorgie est une des terres d’origine de ce grenadier dont le fruit personnifie l’ascèse et plus encore l’Eglise, en tant que communauté des croyants dans la symbolique chrétienne ( la corbeille de grenades de Nino dans Le repentir…).

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Dans Moi, ma grand-mère…, le train métaphorise l’unité promise par cette Union des Républiques Socialistes Soviétiques, représentée céans en une totale anarchie, quoiqu’harmonieuse. Il demeure toujours le véhicule du destin et Zouriko rompra avec son âme sœur estudiantine entre deux trains qui s’élancent en sens contraires, effet accentué par le cadrage oblique. Les objets sont enfin une des traductions les plus concrètes de ce symbolisme, tous aussi précieux que signifiants. Par exemple, après la parure, vient le métier à tisser d’Un collier…, qui rattache la femme à une activité et à un lieu. Est-ce pour cela qu’une tapisserie paraîtra bientôt tissée de larmes ?

Au néo-réalisme ( L’âne de Magdana tourné en collaboration avec Revaz Tchkheidze et Les enfants d’une autre en 1958 ), succède le noir et blanc lyrique de Moi, ma grand-mère, Iliko et Illarion, puis les contrastes violents de sa tragédie minérale Vedreba ( L’incantation, La prière, Supplications…et autres traductions ),- le plus important des films d’Abouladze hors ceux édités ici – c’est l’éclosion de la couleur qui va stimuler la richesse d’expression de son cinéma. Plus particulièrement la couleur rouge, qui aura toujours la double fonction allégorique et dramatique ( la chemise, puis le caleçon rouge de Bahadour dans Un collier…, le peignoir de Nino dans Le repentir, les cerises que Narghiza accroche aux oreilles de Ioram au début de L’arbre… ). Après la réussite artistique et chromatique d’Un collier pour ma bien aimée ( la danse multicolore des fées autour de Bahadour ), le cinéaste conserve le même directeur photo, Lomer Akhvlediani, pour L’arbre du désir, second volet de sa trilogie débutée avec Vedreba. D’où ce début ébouriffant sur le vol d’un aigle crevant un ciel bleu violent, puis un cheval blanc à l’agonie dans les coquelicots, avant que leur rougeoiement n’envahisse l’écran pour masquer en la signifiant, la saignée administrée par l’autoritaire et sévère père Tsitsikoré. D’ailleurs, rouge est l’inspiration des poètes, l’énergie des idéalistes et l’innocence des victimes, s’estompant sur les idéaux révolutionnaires étouffés par l’état socialiste.

Sur « la route »

« Rien n’est sans commencement et tout commence par la route » selon Khasboulat le sage. Ainsi, le nouveau-né, baptisé Amrou ( vie ), y cavale nu comme un ver dans Un collier pour ma bien-aimée. En contrepoint, des images de villageois qui s’affairent sur le chemin, semblables à celles de L’âne de Magdana ou de Moi ma grand-mère…. Car c’est bien là le thème et le motif qui revient en filigrane dans tous ses films, bien que situés à différentes époques de l’histoire géorgienne. C’est d’abord la voie de communication, le réseau, qu’arpentent au quotidien les habitants, celle où Méri court à perdre haleine, dépassant les vieux qui saluent Zouriko, mais sans pouvoir le rejoindre et qui voit passer ces petites vieilles englouties sous leurs meules de foin ou un enfant qui tire l’âne chargé de bébés. Mais surtout le chemin initiatique sur lequel doit se lancer le jeune prétendant au mariage pour chercher « un cadeau du ciel à la terre pécheresse », ou plus généralement tout héros en quête d’évolution, Abouladze faisant alors directement référence à Don Quichotte. Enfin, c’est toujours la route-destinée que partagerons ensemble Zouriko et Méri ou Bahadour et ses concurrents. Dans Moi, ma grand-mère…, la répétition des séquences sur le chemin qui mène à leur demeure permet de mesurer l’évolution du personnage ( enfant, puis jeune homme et enfin rendu adulte par le décès de sa babouchka ). Notre existence toute entière est une route. D’ailleurs avant de s’éteindre, la vieille lâche ce résumé sans complaisance « j’ai dérangé la terre pendant 80 ans »… Une sente faite d’amour, qui voit parfois réunir en un même cadre les trajectoires concomitantes mais divergentes de la noble déchue Foufala et d’un garçonnet qui passe en chantant la gloire du grand Roustavéli, ce Homère du Caucase.

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Sans doute que certaines s’avèrent des impasses, comme ces voies de garage d’un cavalier lancé à la recherche de tous les Mahomet ou les quêtes successives d’Elioz, l’homme qui croyait aux histoires à dormir debout. La route se prolonge dans la Cité et devient rue, celle où les amoureux errent au petit matin, voie parallèle qui ne mène finalement nulle part tout en exaltant l’intensité de l’instant présent ou, à l’autre extrémité, la ruelle qui avant Varlam, conduisait à la cathédrale démolie et qu’il faut retrouver. Monstrueuse, privée de début et de fin, c’est enfin la voie  qui prend la couleur et la tristesse des égouts où Sandro et Nino pataugent durant leurs cauchemars. Elle s’incarne même dans ce tissu qu’emprunte la sève qui monte et descend dans l’arbre de vie, car en toute logique, les personnages reviennent toujours à la terre nourricière. Pour L’arbre du désir, Abouladze adopte justement l’arborescence d’un film choral qui réunit sur un tronc commun, les racines de la tragédie parmi toutes ces rancunes ancestrales qui parsèment l’histoire géorgienne. C’est sur cette base solide que vont croître les branches de la future Union soviétique, une fois la sève transmuée en sang.

 

Des marginaux en lutte contre les stéréotypes

Les haines antédiluviennes entre familles ou clans s’attachent à ses récits comme leurs ombres (Vedreba). Les superstitions sont légion : selon ses parents, le simple d’esprit de L’arbre du désir guérira si un noble le frappe. Dans ce contexte archétypique, les protagonistes d’Abouladze sont tout le contraire d’un Stakhanov : cancre tenté par l’absentéisme, naturellement doué pour les études ( Zouriko ), guérisseuse rescapée de la noblesse russe, tour à tour fleur fanée ou papillon bariolé selon ce que la populace veut bien y voir ( Foufala ), jeune premier sous le paletot du pauvre paysan ( Guedia ) ou poète voyageur ( Bahadour ). Les personnages secondaires sont volontiers anaphoriques et véhiculent le message du réalisateur : nationaliste perdu dans le rêve d’une Géorgie mythique, Ioram, paysan prophète et éducateur qui entend venir le grondement souterrain de la révolution, Iliko, borgne clairvoyant. Ou excentriques et loufoques comme l’histrion Illarion Chevarnadze, sorte de « Tartarin de Gourie ». La preuve, en un clin d’œil, ces rustres deviennent géopoliticiens ou experts linguistes. A tel point que dans L’arbre du désir, tous les personnages sympathiques sont un peu fous ou vont le devenir dans une tragédie collective où se matérialise la triste coutume ( évoquée dans Un collier… ) qui veut que femme adultère soit placée à l’envers sur un âne et menée par le village, pour être lapidée.

Abouladze se moque des canons réalisto-socialistes 2 et l’éternelle babouchka devient au besoin harpie. Pour lui, la femme est muse, jeunes filles à marier ou créatures généreuses : Narghiza, la femme provocante de L’arbre du désir, est tolérée sans être écoutée par des paysans gagnés par leurs propres tropismes et envers de la jeune et pure Marita. En groupe, elles se métamorphosent en prédatrices pasoliniennes, avant que le travail et la rudesse de la vie ne les dessèchent et ne laisse que ces cruelles vieilles en noir. Hélas, en Géorgie le patriarcat règne. Et si la femme fume ( symbole d’autorité sur le couple ), on ne les voit jamais boire sur un écran de cinéma, en tout cas pas avant le mitan des années 90 ! Quant aux représentants du pouvoir – moral, temporel ou politique -, ce sont de vieux fous qui ânonnent des stupidités. L’herbe « malsaine » ( selon Tsitsikoré ) où s’affale le cheval, fait mentir ce que disait Zouriko la décennie précédente sur la sagesse des vieux. Dans la tradition du cinéma soviétique, le pope de L’arbre du désir n’est qu’un brigand lubrique et opportuniste, qui donne sans arrêt du « Ma petite brebis, mon enfant » en lutinant Narghiza. La farce n’hésite pas à attaquer religion ou tradition, quitte à s’avérer virulente lors d’une parodie de prière, sacrilège en terre musulmane, par un personnage fantasque ( Un collier…). Moins attendue, la satire politique se fait aiguë sous le vernis de la comédie. En ce sens, le prologue sous forme d’interrogatoire de police qui ouvre Un collier pour ma bien-aimée dénigre par le rire un avertissement lancé aux artistes tentés par la fantaisie, comme aux grandes années d’un réalisme socialiste dont la moustache stalinienne du policier semble battre le rappel. Si les artistes sont coupables d’invention, c’est alors tout le film qui devient de facto une mise en boite de la soumission de toute expression artistique à l’ordre politique. Bien qu’Abouladze affirme aussi que « l’anarchie est la mère de l’ordre », car les périodes troublées enfantent leur Varlam. C’est que Staline a poussé sur le climat de guerre civile et largement abusé de l’obsession de l’ennemi intérieur, alors que par son goût des alliances contre natures et des trahisons, il incarnait, plus qu’aucun autre avant lui, celui qu’il faisait semblant de chercher.

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Abouladze est plus convaincant quand il conteste la place de l’artiste dans la société : « Artiste ? Pas question ! » (Moi, ma grand-mère…). L’art pour l’art est pareillement une absurdité aux yeux et aux oreilles de la police politique. Il suffit de voir la tête du sbire de Varlam, nez collé aux peintures de Sandro, en état de choc. Pour les politiques, comme pour toute autorité morale, l’art doit être à vocation utilitaire, y compris pour les artistes eux-mêmes. Ainsi le peintre du dimanche interrompt ses miniatures pour peindre en douce un tableau plus personnel et moderne. Aux yeux du monde, le créateur se doit d’être glorieux. On songe alors au Pirosmani de Chenguelaïa et au sort réservé à ce grand artiste-peintre par une société rurale et traditionaliste. Ici, si les notables citent une célébrité, elle remonte au moins et toujours à Roustavéli, donc à une œuvre vieille de plusieurs siècles ! Mais l’art d’Abouladze est avant tout populaire. Modeste. Avant de servir d’ambassadeurs de cette culture géorgienne, les objets, peu nombreux chez lui, gardent donc une signification matérielle ( un cadeau ) ou spirituelle ( un don, un objet magique, une œuvre d’art ).

 

L’évasion du cinéma-comédie

« C’est comme si le discernement, la saine appréciation des choses se doublaient automatiquement d’une course buissonnière, d’une caracolade sur les sentiers qui garantit à tout le moins une saine circulation du sens vers les confins de la pensée ».

Robert Benayoun, Les dingues du non-sens

Et si ces récits sont si marquants et tendent vers l’universalité, c’est que l’auteur possède un ton bien à lui. Marqué tout d’abord par cette fibre comique qui s’impose comme genre national dès 1927 avec La belle-mère de Samanichvili ( Kote Mardjanichvili ). Le cinéma comique géorgien va alors se partager entre les clans des Tchiaoureli ( dont Mikhaïl réalise le premier film parlant géorgien, La dernière mascarade en 1934 ) et des Chenguelaïa : Nikolaï le père ( Dans les montagnes noires, 1941 ), cinéaste très populaire et les enfants, Georgui ( Pirosmani, biopic d’auteur dramatique ) et l’ainé Eldar ( auteur du réputé féroce Les montagnes bleues en 1984 ). En dehors des modes, le génial Mikhaïl Kobakhidzé a tourné une poignée de courts-métrages burlesques qui lui vaudront les foudres du pouvoir ( La noce, Le parapluie…) et l’interdiction de réaliser des films après 1969. Les premières œuvres d’ Otar Iosseliani croisent elles aussi poésie et humour décalé et désabusé. Mais l’auteur le plus populaire ( car le plus vu quand les autres sont bien souvent interdits ! ) en URSS est incontestablement Georgui Daneliya qui avec Ne t’en fais pas ( 1969 ) fera de ce remake de Mon oncle Benjamin un des plus gros succès du box-office, imposant son style tragi-comique.

C’est cette même veine qui nourrit les dialogues des films d’Abouladze ( « Aucune femme ne savait maudire comme elle ! » )… Il est théâtral par le phrasé. Un personnage de géorgien typique dit très à propos de lui-même « J’ai une voix tragi-comique », car la langue guide l’esprit et l’impulse dans la gestuelle burlesque. Si la séquence dure un peu trop ( celle du maçon ), elle fonctionne encore grâce à sa faconde méditerranéenne. Son approche de la comédie se veut donc volontairement outrancière et théâtrale ( les comédiens jouent de leurs faciès à moustaches comme des diables, tantôt joyeux, tantôt terribles ), d’où un humour oriental à la dimension clownesque assumée ( Staline n’idolâtrait-il pas Chaplin ? Et n’oublions pas qu’Abouladze a d’abord étudié le théâtre à Tbilissi de 1943 à 1946, avant de rejoindre le VGIK et les cours de Youtkevitch ou Romm ). Mais rien ne prépare le spectateur d’aujourd’hui à ces envolées hilarantes ou pour le moins surprenantes… C’est surtout dans Un collier pour ma bien-aimée que le ton hésite constamment et ce, dès l’épilogue, entre drame – reprenant là où il avait laissé le spectateur de Vedreba – et comédie débridée. L’itinéraire parait de plus en plus fou quand Bahadour est apostrophé par un vendeur d’oignon Monty Pythonesque. Plus loin, la promise, Saltanat, tente d’abattre le héros à la mitrailleuse lourde ! Gag sidérant mais amené par l’accumulation-répétition du rôle des armes dans le quotidien géorgien et attribut de la plus explosive des formes de communication amoureuses. Et c’est encore la scène de la chasse au lièvre, qui dérape dans l’agitation nonsensique entre Zouriko et Illarion.

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En réalité, Abouladze adore le raccord gaguesque et ses effets d’accélération sur le récit picaresque. Dans sa quête d’un cadeau pour sa fiancée, le protagoniste a ainsi maille à partir avec des hordes de femmes, toujours plus nombreuses et qui débarquent de plus en plus tôt dans la scène, visions similaires au célèbre Fiancées en folie de Keaton. Le cinéaste affectionne aussi les chutes, et même au sens littéral avec l’âne d’Iliko. Le gag, surréaliste, peut battre en brèche toute logique narrative ( le télégramme ). Dans celui, visuellement naïf, de la casquette de Bahadour qui flotte comme par magie au-dessus de la couche de Serminaz, l’anachronisme du dialogue vient redoubler l’effet  (« une soucoupe volante ! » ). Enfin, son ironie à double sens se révèle lors de traits vivifiants. Le nom de famille d’Illarion est Chevardnadze, comme Edouard, ministre de l’Ordre public de la Géorgie de 68 à 72, puis premier secrétaire du parti communiste géorgien. Clin d’œil ou « hommage » ? Iliko, le vigile du kolkhoze, choisi pour sa «vision saine du monde » … est borgne ! Après tout, un proverbe géorgien ne dit-il pas : « On donna des yeux à un aveugle, et il demanda des sourcils. » ?

Profitant d’une vague des années 60 qui va s’affranchir des canons socialistes, Abouladze raccourcit les jupes des filles. Avec Saltanat, potière-ogresse, il peint un personnage de femme forte, dont la vie amoureuse est évoquée en un seul travelling prosaïque sur les photos de ses mariages précédents, dont elle dévoile les dates rapprochées en les retournant successivement. Parfois, en mélangeant sens plastique traditionnel et langage comique actuel, Abouladze rejoindrait presque certains collages dadaïste de l’école tchèque. Moments furtifs coulés dans des récits en apparence plus acceptables… De ces quatre films, se détache la séquence du départ à la guerre dans Moi, ma grand-mère, Iliko et Illarion, idéal balancement entre saillie dramatique et humour décalé, avec une férocité digne de la comédie à l’italienne mais surtout, une recherche graphique qui laisse pantois. Car pris dans une vaste unité narrative, le langage loufoque d’Abouladzé ne craint pas le changement radical de ton, comme le prouve ce petit air « Nouvelle vague » qui accompagne naturellement la vie étudiante et urbaine de Zouriko.

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Montage, mon beau pays !

Les soviétiques ont toujours accordé au montage une importance fondamentale. D’un côté les tenants d’une dramaturgie, descendants des recherches de Koulechov poursuivies, entre autres, par Poudovkine. De l’autre l’expérimentation formelle de Dziga Vertov qui veut transfigurer le réel et tendre vers l’abstraction. C’est surtout Eisenstein qui par son « montage des attractions » associe des images qui, s’il veut surprendre le spectateur, n’en restent pas moins soumises à une signification évidente. 3 « Le montage est cette opération qui porte sur les images-mouvements pour en dégager le tout, l’idée, c’est à dire l’image du temps ». 4 Abouladze fusionne visiblement toutes ces conceptions. Comme chez Eisenstein, ses spires semblent reproduire tout ou partie d’un ensemble plus vaste, en entretenant une dialectique permanente qui se retrouve ici dans des passages d’une grande force émotionnelle où se succèdent tous ces visages issus du grand cinéma soviétique. Cette capacité de sublimation fait de chaque habitant un héros. A ses débuts, le cinéaste ne craint pas non plus le faux-raccord ( la fille qui se morfond en arrière-plan est remplacée par Méri dans le plan suivant, la course du jeune couple n’est pas raccord du tout ). D’où l’impression de liberté qui se dégage de cette « dimension de l’Ouvert » selon Deleuze, car « les faux-raccords sont l’acte du tout ». 4 Une manière pour Abouladze de créer son méta-univers. Des effets, vieux comme le cinéma lui-même, en redeviennent émouvants : son chien passe, Zouriko lui court après, puis c’est la grand-mère qui court après le petit fils, la poursuite se déroulant en accéléré. Ludique, le cinéaste aime casser le rythme par une séquence autonome : scène sous l’arbre, fanfare d’adieu aux soldats, épisode comique de la vache Pakizah, en une sorte de signature. Des raccords surprenants et poétiques continuent la tradition du montage des attractions. « Si l’on peut parler d’une école soviétique du montage, ce n’est pas parce que ses auteurs se ressemblent, mais parce que, dans la conception dialectique qui leur est commune, ils diffèrent au contraire, chacun étant en affinité avec telle ou telle loi que son inspiration recrée ». 4 D’où une stimulation des affects éprouvée à la vision d’une petite fille qui danse dans Un collier… ou du cheval qui pleure au début de L’arbre du désir. D’une épiphanie cinématographique sur Foufala en prière, collée à la danse d’un diablotin dans l’embrasure de la porte, césure entre Ford et Tarkovski.

Abouladze a le sens de l’ellipse comme le crie – muettement – la fin très moderne, et déchirante, de Moi, ma grand-mère… . Méri voit passer, impuissante, un Zouriko terrassé par le deuil. La caméra le laisse traverser le bord d’un champ labouré sur une voix-off optimiste et qui contredit la tristesse éprouvée à la vue du plan précédent. Méri relève la tête les yeux pleins de larmes et en contrechamp le regarde gravir encore une fois cette route sur la colline avant que, dans ce plan qui dure, elle ne rerentre dans le cadre tout en haut à gauche, minuscule, pour l’attendre et marcher avec lui. C’est bien l’amour qui abolit le temps et l’espace, synonyme d’immortalité. Un « bond pathétique », ainsi nommé par Deleuze pour désigner un changement d’état ou de puissance émotionnelle par un effet de montage dialectique. La seconde scène d’ Un collier… est aussi à marquer d’une pierre blanche. Après une succession de plans dramatiques, série intensive d’images-affection « unissant directement une réflexion collective immense aux émotions particulières de chaque individu » 4, surgit un bébé nu qui sourit à la vie embarquant le récit dans la comédie. En répétant les mêmes plans en une séquence modifiée ( qui proroge l’ « image modifiée » chère à Ford ), Abouladze stimule moins notre capacité d’interprétation qu’il ne nous renvoie à notre vocation au tragique et à la nature ambivalente des géorgiens. Les mines sévères des villageois ne sont qu’un raffinement de mise en scène, le rituel obligé pour tout mariage heureux. La répétition des motifs crée une complicité avec le spectateur et contribue à l’immerger dans la narration ( les enfants-pupitres de la fanfare ). De film en film, et c’est d’autant plus visible si on les aborde par ordre chronologique, le montage devient plus subtil, les images fortes s’enchaînent toujours mais avec souplesse. C’est donc la fameuse mort du cheval dans les coquelicots, seulement troublée d’un soupir, qu’Eisenstein aurait nommée « chromophonique ». 5

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Mais dans Moi, ma grand-mère Iliko et Illarion, Abouladze paie aussi son tribut à Vertov, avec des raccords qui ne sont que mouvements purs et rappellent ses « intervalles ». « Chez Vertov, l’intervalle de mouvement, c’est la perception, le coup d’œil. L’œil ». 4 Ou les recherches de l’Avant-garde européenne « C’est une coupe mobile, c’est à dire une perspective temporelle ou une modulation ». 6 Le geste n’est pas gratuit. Abouladze déplace le curseur temporel sur son film-route, utilisant au maximum les possibilités spécifiques de son médium, car « le cinéma réalise le paradoxe de se mouler sur le temps de l’objet et de prendre par surcroît l’empreinte de sa durée ». 7 Son opérateur, Georgui Kalatozichvili ( fils du génial Mikhaïl Kalatozov et futur réalisateur ) traduit parfaitement les idées les plus audacieuses du metteur en scène, tel ce travelling avant en caméra portée qui papillonne dans la foule à l’instant des adieux. L’alliance de la forme et du fond se réalise dans cette séquence équivoque, comme dans le moment magnifique où ce fils qui part au front, Koukouri, joue une dernière fois de la trompette pour sa mère. Les plans terminaux, suite de compositions statiques, jouent du tragique en détournant le sens plastique classique d’Eisenstein, trouvant d’incroyables diagonales ! Les absents continuent alors d’habiter le cadre à travers les instruments abandonnés, sublime évocation des martyrs de la guerre, sans jamais héroïser leur sacrifice. Abouladze cloue sur place la détresse de cette populace magnifique dans un travelling arrière contraire au précédent, apprêté et spatialisé. Jusqu’à ce petit bonhomme dérisoire qui termine seul, bord cadre, avec sa clarinette, statufié dans une posture ridicule qui peine à contenir la noblesse du père éploré. Le montage apparaît ici comme un travail de condensation assez similaire à celui du rêve. La caméra-œil tient le rôle de témoin et les frontières avec le documentaire deviennent poreuses quand Zuriko lui jette un regard de défi, l’objectif choisissant de se détourner pudiquement de leur premier baiser.

 

Des miniatures et des hommes

La composition des plans rejoint aussi Paradjanov et son inspiration plastique orientale dans celui où les parents de Serminaz montent la garde devant le lit de leur fille. Un tableau vivant qui trouvera son contraire dans L’arbre du désir, ou l’amour impossible de Marita et Guedia et le mariage comme consensus social, vu à travers les fenêtres comme chambre de projection… Costumes et décors respectent également la tradition mais en intégrant les recherches les plus fouillées. Abouladze aime là encore jouer du contraste, par exemple entre le visage mortifié de Marita et la beauté du costume de mariage, vu alors comme un simulacre. L’aspect délirant de Foufala ( ses costumes de poupées défraîchis, son maquillage et sa coiffure démente ) prend une toute autre dimension parmi les flammes des cierges qui vacillent dans l’obscurité de l’église, chambre des désirs qui tente d’expier la mort en marche de la beauté. La musique joue un grand rôle, d’abord avec ce commentaire musical sur l’apparition de Illarion en « grand chasseur » et dont le thème rappelle le Prokofiev de Pierre et le loup. Elle frôle la caricature 70’s dans Un collier…, avec son thème burlesque récurrent. Le son n’est jamais laissé de côté et peut parfois entrer en contradiction avec les images, comme ce bruit de train qui évoque l’appel au bouleversement politique à venir et qui permet de raccorder par l’image, passion amoureuse et révolution. Ce sont encore ces chants d’oiseaux qui expriment la joie du simple d’esprit s’avançant vers la maison, le décolleté généreux et le sourire éclatant de Narghiza. Et de profundis, l’ambiance sonore cauchemardesque de la fin de « L’arbre… », longue plainte qui monte des entrailles de la Géorgie.

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Certes, le style du réalisateur s’affine au fur et à mesure, alors que paradoxalement l’amertume le gagne. La trahison des idéaux rend plus lourde le joug soviétique qui pèse sur le cinéma géorgien ( interdictions de travailler pour Mikhabelidze puis Paradjanov, films tellement souvent interdits de projection dans son pays qu’Otar Iosseliani choisira l’exil vers la France à partir de 1982 ). D’abord avec la fin de L’arbre du désir et ce bien que le récit prenne place dans la Russie pré-bolchevique. Le ton est alors si grave qu’il sonne comme un rappel de la nécessité de toujours chercher à réaliser les objectifs révolutionnaires et non de museler la liberté d’expression. C’est que le géorgien attend encore que le ciel se déchire, quand sur la terre, les hommes s’entre-dévorent. A tel point que les animaux, pourtant toujours traités jusqu’ici sur un pied d’égalité avec les humains, prennent soudain peur de cette violence sociétale et archaïque. Le finale expressionniste, lugubre et insoutenable, car polyphonique, de L’arbre du désir a beau être tempéré d’un maigre espoir, Abouladze a vieilli et s’emplit maintenant de mélancolie. Même la fille d’Elioz qui a sacrifié sa jeunesse à chercher les recettes toutes faites de son père pour atteindre le bonheur, finit par demander à l’arbre à souhaits : « Aide moi à te trouver ». « D’où vient la beauté de notre monde ? Où s’en va-t-elle ? Où se perd-elle ? Pourquoi disparaît-elle? Ou ne nous cache-t-elle seulement qu’un moment son visage ? Comment savoir ? » Sur ces mots s’achève un film-poème labile, commencé dans les coquelicots et dont le cœur saigne sur les chardons.

 

Remords et résilience

« Cependant, les mêmes mains qui nous avaient passé les menottes, aujourd’hui, conciliantes, nous présentent la paume : « Non !… Il ne faut pas remuer le passé !… Quiconque fera mention des temps révolus, qu’on lui arrache un œil ! » Mais le proverbe s’achève ainsi : « Et quiconque l’oubliera, qu’on lui arrache les deux ! »

Alexandre Soljénitsyne, L’archipel du goulag

Le cinéaste, comme le peintre Sandro, ne croit plus que les dirigeants soient au service de la cause populaire et pire, ils sont même devenus un ennemi de la culture. Il profite du pouvoir du premier secrétaire d’alors, Edouard Chevarnadze, extrêmement favorable au cinéma, pour tourner non-officiellement Le repentir. Alors ce pays natal redevient le terreau de ses cauchemars pour achever cette trilogie – informelle – qu’Abouladze a débuté avec Vedreba.

On peut imaginer combien il était difficile d’appréhender le cinéma du géorgien en commençant par la fin. Un peu comme le Salo de Pasolini s’avère le négatif de sa filmographie. Ici, il s’agit d’une œuvre au noir qui fait de son langage tout entier une oraison funèbre ricanante. Son tyran confisque à son profit la philosophie confucéenne, déterminé « à capturer le chat noir dans la pièce obscure, même s’il n’y est pas ». Si la filmographie de Tenguiz Abouladze était un collier, Le repentir en serait le diamant noir, le point aveugle et sa construction, une cathédrale, avec tous ses ornements, ses clés de voûte, ses arcs-boutants et son transept, où pourrait enfin résonner son requiem pour la Géorgie. 8 Un film qui affiche clairement sa symbolique chrétienne, à la fois comme revendication culturelle mais aussi comme foi inébranlable, même le diable finissant par y manger le poisson, l’animal psychopompe, à la racine ! Le film a valeur d’exorcisme et veut extirper Joseph Djougachvili comme une paille de cet œil du Kremlin, dans ce très graphique plan aérien, où le cercueil du dictateur sert de bélier pour ébranler un monde onirique totalitaire, unicellulaire et étriqué. C’est le pendant fictionnel, le film-cerveau visionnaire qui autorise le début du nécessaire travail de mémoire qu’accomplira plus tard Iossif Pasternak avec son immense documentaire Goulag. Le repentir est basé sur des artefacts et sur le mensonge dialectique, à l’image de cette fausse démocratie gérée par d’une poigne d’acier par ce leader bonhomme, qui laisse s’écrouler le patrimoine pour promouvoir un culte unique, celui de sa propre image et ce, plus que n’importe quel tyran auparavant.

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Ici donc, le personnage de Varlam a contaminé le récit jusque dans ses niveaux extra-diégétiques et a rendu la forme pathoplastique. Ce ne sont qu’espaces réduits et intérieurs solennels où règnent les ombres, où la lumière elle-même menace d’être avalée par le sinistre démiurge. Comme s’il fallait la cacher, sinon le vampire se vide de son sang. Abouladze ose même une intéressante variation sur le monolithe de 2001 masquant la lumière, en les démultipliant en une armée qui encercle alors l’idolâtre. Varlam/Staline, c’est un peu la mort du cinéma… Et si l’on s’étreint d’abord à la nouvelle du décès, c’est moins de tristesse que de soulagement. A noter que le premier extérieur est muet comme un cimetière, mais très parlant ! Pourquoi pas, puisqu’ici, plutôt que des personnages, on croise des présences allégoriques qui hantent les couloirs d’un film labyrinthique. La logique a été laminée par l’arbitraire, restent des fragments « tordus, morcelés, réunis comme des glaces flottantes ». 9 Il a en analepse, confisqué son âme à cette ville qu’il gouverne et ne reste qu’un théâtre dérisoire. Il monte en chaire, surplombant une horloge, juste dominé par le haut-parleur qui rendra son bagout divin, avec en arrière-plan une potence où se tient perché un corbeau de jais. Symbolique pesante certes, aussi encombrante que le fut Staline durant 25 ans et plus…

Sandro entre lui dans le film par une séquence étrange, où le décor futuriste d’un immense émetteur radio a remplacé la foi orthodoxe ancestrale.
« Le destin du savant contemporain est tragique, son inspiration le mène à la clarté et au détachement intérieur. Au prix d’efforts surhumains, il a forgé l’outil de son esclavage social et de la ruine de sa personnalité. C’est allé si loin que le pouvoir politique lui a mis une muselière. Le temps est-il révolu où sa liberté et son indépendance intellectuelle étaient à même d’éclairer et d’enrichir la vie des hommes ? Dans la recherche aveugle de la vérité scientifique, a-t-il oublié sa dignité, sa responsabilité envers l’humanité ? Une crise menace le monde et les puissants ne le voient pas. La force libérée de l’atome a tout changé sauf les mentalités et nous glissons vers une catastrophe comme on n’en a jamais vue. Pour que l’humanité survive, il faut penser autrement. La mission de notre époque est de conjurer cette menace. A l’instant décisif, ma voix s’élèvera de toute la force qui me restera ».

Ce discours d’Einstein résonne dans la cathédrale transformée en laboratoire monstrueux. La femme avance, cernée par des formes phalliques oppressantes, tandis que sur le vitrail antique, qui seul a gardé la trace d’un passé religieux, un homme pleure aux pieds d’une madone. Image sereine qui sera bientôt remplacée par une « ouvrière sublimée en madone », nouvelle doxa du réalisme socialiste balbutiant, cette esthétique dont Abouladze a cherché à se démarquer, comme beaucoup de cinéastes de sa génération. Son inspiration fantasque préfère les esquisses ou les traits fulgurants aux images d’Epinal sans vie. C’est à peine si un rayon de lumière divine se fraie ici un chemin jusqu’au chœur. Juste pour mettre l’artiste sur le même plan que le scientifique. Et c’est maintenant l’auteur qui s’adresse à eux. En 1984, Chevarnadze n’est pas encore ministre des Affaires étrangères. Hors c’est lui qui entamera le début du désarmement, après une guerre larvée Est-Ouest qui n’en finissait plus de faire peser une menace sur l’Europe et le reste du monde. La mise en scène effrayante de ce beau discours humaniste exprime une prière fervente, tout en rappelant de façon concrète la tromperie du stalinisme à l’échelle mondiale.

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Le plan inaugural du Repentir est encore une fleur, mais elle aussi factice, faite de crème pâtissière pour être dévorée par l’ogre. Plus loin, ce sont de vrais œillets, fauchés comme les victimes des grandes purges et destinés à embellir la vérité historique. Il ne s’agit pas de refuser le biopic mais de créer une distanciation pour évaluer la puissance de ce mal absolu qui s’apprête à fondre sur Sandro et Nina ( « l’heure des épreuves va bientôt sonner » ). «Il serait la forme spécifique, répétitive mais différentielle de cette épreuve à la fois traumatique et féconde, la rencontre nue avec l’Irreprésentable ». 9 Même dans ces métonymies au long cours, on ne parle de cauchemar que si le dormeur se réveille… L’examen des exactions staliniennes va entraîner le pays tout entier dans un gouffre délétère où il risque de se perdre, comme cette plongée oblique, en équilibre au-dessus de la tombe. Mais il est impossible de s’y soustraire. Pour Varlam comme pour ses victimes, car « Ils nous retrouveront même sous la terre». La fable revient à la charge pour donner la « chasse aux loups ». La question « Comment le lièvre prouvera-t-il qu’il n’est pas un loup ? » s’adresse directement aux rouages grippés du pouvoir communiste à la veille de l’ère Gorbatchev. Le tyran lui, arbore les signes distinctifs de l’élite de sa fonction. Ainsi, une petite moustache hitlérienne obscurcit le sourire carnassier de Varlam ( excellent Avtandil Makharadze ) quand la chemise noire italienne achève d’en faire un antéchrist et les lunettes façon Béria, un polichinelle contemporain qui n’aurait pas dépareillé quelques mois plus tard dans Brazil. En contrechamp, le rêve de Nino, leurs têtes engluées dans la matrice terrestre, au sortir d’une poursuite éprouvante, évoquent la mainmise du dictateur sur l’esprit même de ses sujets. De pasionaria en peignoir rouge sang, Nino déteint sous la souffrance. Mais « même quand elles rejoignent les ombres, les icônes vieillissent autrement ». 10

Les chants eux aussi se transforment en opérette bouffonne, la coscénariste Nana Djanelidze signant en outre la tonitruante musique du film, marquée par la représentation permanente de ce ténor de l’assassinat de masse, alternée avec les grands airs classiques, revus et distordus. Varlam Aravidze s’approprie jusqu’à la poésie, détournant la fonction artistique comme il a dévoyé la praxis communiste, en un programme criminel, devant la petite famille, encadrée comme au tribunal, condamnée à l’écouter en un tableau sinistrement drôle.

« Lassé de tout, j’aspire au repos de la mort.
Las de voir la vertu vivre déguenillée,
La nullité drapée en ses oripeaux d’or,
La foi la plus pure honteusement violée,
Les places d’honneur honteusement occupées,
La vierge prostituée au désir brutal,
Le plus haut mérite abjectement honni,
L’âme forte tuée par un décret boiteux,
L’Art bâillonné par le pouvoir,
La bêtise, sous les habits de doctes, régentant le génie,
Le loyal et le vrai nommés simplicité
Et le bien soldat captif du capitaine Ignominie. »

Il est vrai que Staline constitue un personnage shakespearien 11 plus séduisant que le trop sage Roi Lear des adaptations presque académiques de Kozintsev… Fidèle à la mouture de son cinéma, Abouladze recrée l’aspect légendaire de l’homme fort et indispensable. Les sauts par la fenêtre de son fils, du tyran et de ses assesseurs sur leurs chevaux ne sont pas qu’une parodie de suicide collectif. Ils descendent en droite ligne de cette mythologie chevaleresque géorgienne et de la chanson de gestes, en même temps qu’ils expriment le caractère surnaturel et omniprésent du mal. Staline était ce méchant prestidigitateur qui fait écho aux saltimbanques du Collier, car capable de faire disparaître tout un chacun à loisir. La remise en bière n’est pas seulement mise en scène de comédie à la géorgienne, mais travestissement permanent de l’histoire dans un pays où on arrête même les cadavres avant que de les mettre en cage. Cette question est posée pour mieux être réfutée : « Il y a des morts qui valent mieux que des milliers de vivants ». Varlam devient l’antagoniste absolu de tout le cinéma d’Abouladze, la négation de la croyance. Bien que le sujet ne s’y prête pas, c’est sur un rythme de comédie que l’auteur donne le la. C’est à ses descendants qu’il incombe de gérer l’embarrassant héritage sous la forme d’un fantôme. Comme la bru-maîtresse du tyran, il est l’heure de tomber le masque.

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L’alibi de la vengeance se charge d’ensevelir concrètement la figure mythique, refusant ainsi toute résurrection possible aux mystiques du stalinisme. Mais le fantastique lui ressurgit dans les visions qui vont hanter les flashes backs au cours desquels Sandro et sa famille ont maille à partir avec le totalitarisme, suite à une entrevue initiale inquiétante, avec ce politicien prédateur qui ne craint pas l’aporie. Son portrait dessine le grand écart entre son intransigeance et un populisme affiché, toujours pour mieux justifier une répression unilatérale. Ce ne sont sans doute pas là les séquences les plus réussies, car explicatives et voulant dénoncer clairement l’absolutisme et l’absurdité des déportations de masse. L’intrusion de gardes en armures et côtes de maille donne une dimension intemporelle à la tyrannie, une entité qui doit être combattue quelle que soit l’époque. Les chefs d’accusation enfoncent le clou du surréalisme sans crainte de la parodie : « creuser un tunnel de Bombay à Londres ». Abouladze est sans doute un peu pédagogique, en reprenant la phrase dans la bouche même du mentor de Sandro, dont la folie importe beaucoup plus.

A une certaine grandiloquence ( le petit-fils qui s’adresse en regard caméra au spectateur ), qui va de pair avec la sublime scénographie, les critiques de l’époque préféraient le naturalisme de la séquence des rondins, plus classique dans son thème mais bien montée et qui cache néanmoins sous son réalisme blafard, un sens métaphorique pourtant limpide : des arbres comme des corps inertes broyés dans la mâchoire d’un bulldozer, régentant un univers uniformément boueux et triste. « Un vrai moment de cinéma, le seul du film » pour les Cahiers. 12 Nina et Kati cherchent désespérément une trace de vie laissée par Sandro sur les troncs en provenance de Sibérie, « moment où la qualité d’émotion doit tout à la sobriété de l’expression » selon Guy Gauthier 13, qui déplore des ruptures de ton nuisant à la cohérence du film qui verserait dans la préciosité. « Œuvre-symbole » d’un « cinéaste limité » ( qu’il compare à Klimov, largement réévalué depuis, dont la « fable édifiante » est expédiée en trois lignes dans le même numéro des Cahiers ) toujours pour Antoine de Baecque, dont l’analyse politique a bien sur vieilli et qui s’égare dans des références supposées explicites à Chaplin ( probable mais comme tout un chacun, ni plus ni moins ) ou Bunuel.

Le repentir, ce film « qu’il n’a pas su faire » 12 est au contraire son grand œuvre, sans doute trop ample et qui cherche comme son personnage monstre à parler au plus grand nombre de spectateurs. Il y est d’ailleurs parvenu devenant le grand succès de l’année 1987 ( 700 000 spectateurs en 10 jours à Moscou ! ). Eût égard à sa gestation mouvementée, il est loin d’être consensuel. La perestroïka qu’il appelle de ses vœux sera paradoxalement des années plus tard l’antichambre de la guerre civile et la mort du cinéma d’auteur géorgien, écrasé commercialement par les sorties américaines. Tenguiz Abouladze lui entamera une autre carrière, directement politique mais toujours théâtrale et qu’on peut imaginer mouvementée, celle de député.

 

 

1 : Voir le beau documentaire de la cinéaste Nana Djanelidze ici : http://www.eurochannel.com/fr/La-legende-des-chants-georgiens-Nana-Janelidze-Georgie.html

2 : Il s’agit de choisir des personnages archétypaux, représentés dans des situations communes pour célébrer les qualités de l’homme soviétique et ses aspirations au progrès socialiste. On pourra se reporter à l’ouvrage Le réalisme socialiste soviétique de la période jdanovienne (1947-1953), vol. 1 : Baudin Antoine, les Arts plastiques et leurs institutions.

3 : http://www.cineclubdecaen.com/analyse/cinemarusse19241933.htm
4 : Gilles Deleuze, L’image-mouvement.
5 : SM Eisenstein, Sur le montage, Film sense 1942
6 : Gilles Deleuze, L’image-mouvement, à propos de Jean Epstein
7 : André Bazin, Qu’est-ce que le cinéma ?
8 : Ce titre polysémique prend tout son sens si on examine les deux définitions du mot « repentir » données par le Larousse :
– Vif regret éprouvé pour une faute commise, accompagné d’une promesse de réparation.
– Correction apportée par un écrivain, un artiste à son œuvre, à son texte et en particulier par un peintre à son tableau en cours d’exécution.
9 : Maxine Scheinfeigel, Rêves et cauchemars au cinéma.
10 : Diane Bertrand, Changements de têtes, Rouge profond.
11 : William Shakespeare, Sonnet 66, déclamé par Varlam Aravidze dans Le repentir
12 : Antoine de Baecque, Cahiers du cinéma n°400, octobre 1987
13 : Guy Gauthier, Saison cinématographique 1987

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