À l’occasion de sa récente ressortie en Blu-Ray chez Rimini Éditions, retour sur l’étonnant Audrey Rose de Robert Wise, sorti initialement en 1977.

Copyright Rimini Editions

New-York, fin des années 1970. Un homme, Elliot Hoover, se présente chez les époux Templeton et leur affirme que leur fille, Ivy, est la réincarnation de sa propre enfant, Audrey Rose, morte brulée vive le jour de la naissance d’Ivy. Si le père de cette dernière, Bill, rejette catégoriquement cette idée, Janice, son épouse, commence à s’interroger, d’autant plus qu’Ivy souffre de violentes crises de démence que seul Hoover parvient à calmer. 

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Réalisé entre L’Odyssée du Hindenburg (1975) et Star Trek, le film (1979) par le prolifique Robert Wise, Audrey Rose est un exercice de style déroutant, témoin non seulement de la versatilité notoire de son metteur en scène mais aussi d’un pan entier du zeitgeist des années 70. 

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Construit, au même titre que L’Exorciste (1973) de William Friedkin, autour d’une enfant dont le comportement inexplicable voit s’affronter les diagnostics les plus cartésiens et les théories les plus mystiques – à ceci près que la possession et le catholicisme sont ici remplacées par le bouddhisme et l’hypothèse d’une réincarnation survenue trop tôt – Audrey Rose diffère de son prédécesseur par sa volonté de maintenir le doute le plus longtemps possible – c’est-à-dire jusqu’à ses dernières minutes, là où le film de Friedkin le dissipait vers la fin de son deuxième acte – dans l’esprit du spectateur. Cette volonté se concrétise par l’affrontement, constamment renouvelé au cours du récit, entre le point de vue rationnel défendu par Bill Templeton et celui, spirituel, auquel adhèrent Elliot Hoover mais aussi Janice Templeton. Cet affrontement – bien plus intéressant que la conclusion du film en elle-même, celle-ci ayant le mauvais goût de répondre à des questions qu’il aurait sans doute mieux valu laisser en suspens – confère au film ses meilleures scènes, le spectateur pouvant y voir une allégorie évidente du divorce (le film passe le plus clair de sa durée à dépeindre le déchirement du couple des Templeton, le réconfort que trouve Janice en la personne de Hoover et le rapport paternel que celui-ci entretient avec Ivy, qui elle-même souffre d’être tiraillée entre deux mondes qu’elle ne comprend pas) doublée d’un commentaire social – et aujourd’hui historique – des plus pertinents sur le mal-être existentiel et le manque de spiritualité du peuple occidental ayant permis au bouddhisme d’y trouver un grand nombre de nouveaux adeptes au cours des années 1970.

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Témoignant d’un intérêt véritable pour ce duel entre science et religion et misant, pour lui donner corps, sur un traitement réaliste du sujet (ce qui conduit notamment Audrey Rose à s’éloigner de son ambiance mélodramatique initiale pour se muer en film de procès…) Robert Wise parvient ainsi, sans recourir au moindre effet spécial irréaliste et en dépit d’une conclusion venant arrondir les angles d’une histoire jusqu’alors saisissante, à distiller avec succès un doute de plus en plus envahissant dans l’esprit du spectateur, qui manque plusieurs fois (tout comme le personnage de Janice) de perdre pied.  

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Empreint, quitte à paraître naïf, d’une spiritualité rappelant les mouvements hippies, mais résumant de façon brillante un aspect essentiel des seventies, Audrey Rose rafraîchit avantageusement un genre fantastique alors saturé d’influences bibliques et distille en maître son suspense pour un résultat imparfait mais captivant, qui laissera son public sonné.

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