Revelations of Divine Love de Caroline Golum : psychédélisme mystique et carton-pâte féministe
© Caroline Golum
Avec Revelations of Divine Love, Caroline Golum signe une relecture aussi irrévérencieuse qu’audacieuse de la vie de Julian of Norwich, mystique anglaise du XIVe siècle, première femme à avoir écrit un livre en anglais. À rebours du film historique académique, Golum embrasse une esthétique résolument artisanale et psychédélique, où décors en carton-pâte, couleurs saturées, et hallucinations théologiques composent un univers hors du temps, miroir distordu de nos crises contemporaines.
La réalisatrice transpose dans une atmosphère baroque et théâtrale les visions mystiques de Julian – ses dialogues avec le divin, ses combats contre les autorités masculines de l’Église, son isolement volontaire – tout en tissant des résonances fortes avec les luttes actuelles : pandémie, effondrement institutionnel, fatigue du pouvoir patriarcal. Ce télescopage de temporalités transforme le film en méditation anachronique sur le repli spirituel et la résistance féminine. Le Moyen Âge n’est pas ici un passé révolu mais une chambre d’écho du présent.
© Caroline Golum
Golum fait le pari d’un cinéma lo-fi assumé, qui évoque autant Ken Russell que Derek Jarman ou Guy Maddin : effets spéciaux rudimentaires, transparences visibles, costumes bricolés et peintures expressionnistes. Ce kitsch revendiqué devient le langage d’une intériorité en crise, où la foi et la folie, la solitude et la transcendance, s’entrelacent dans un grand théâtre mental. Il ne s’agit pas de reconstituer la vie de Julian, mais de la faire halluciner – de la réanimer comme figure politique et poétique.
Au cœur du film, la performance de l’actrice principale (dont le regard frontal et habité rappelle parfois celle de Tilda Swinton dans Orlando) est traversée par une tension entre extase et épuisement. Les visions divines ne délivrent pas de vérité, mais déclenchent une série de mutations : la femme recluse devient oracle, la recluse devient sismographe de son époque. L’amour divin promis n’a rien de consolateur ; il est la brûlure même de l’insoumission.
© Caroline Golum
Revelations of Divine Love est un ovni mystico-féministe, autant hommage à une figure méconnue qu’expérience visuelle désorientante. En refusant la reconstitution lisse, Caroline Golum choisit de penser l’histoire comme un rêve lucide, à la fois politique et spectral. Un film fragile et exalté, comme une prière de travers adressée à notre époque.
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