Zorn en serial – épisode 7b : "la débâcle"


 

Fin de la pause, le programme redémarre!

(et si vous avez raté l’incipit(ch) introductif, rendez-vous là)
quattrocento :
dans les marges, les disques des compagnons de jeu
Zorn a toujours rendu hommage à ses pairs et amis musiciens, qui lui ont permis de développer ses idées et surtout, de les rendre techniquement possibles. Petit inventaire donc, de quelques faits discographiques de ces proches qui entretiennent beaucoup d’accointances avec les disques du sieur John, quand ils n’en sont pas, une source directe d’inspiration.
Les cartoonades zorniennes doivent autant au compositeur Carl Stalling qu’à la frénésie burlesque du guitariste-improvisateur Eugene Chadbourne, surtout quand celui-ci revisite des hymnes et chansons populaires américaines, banjo ou dobro en joue, dans un blue grass totalement hystérique. Citons l’enregistrement séminal There’ll Be No Tears Tonight (1980, avec Zorn) mais aussi String et Songs (1990)

 

 

Arto Lindsay, musicien brésilien expatrié à New York, se fait connaître fin 70 par sa formation « No Wave », bruitiste et atonale, « DNA », aux côtés d’Ikue Mori (album intégrale DNA on DNA) mais aussi à travers ses enregistrements solo qui vont d’une sorte de funk synthétique eighties (les 3 albums des « Ambitious Lovers »), au trio d’improvisation noise (Aggregates 1 26 (1995)) à une relecture contemporaine et subtile de la Bossa Nova (The Subtle body et Mundo Civilisado (1996), Noon Chill (1998)). Il est par ailleurs l’un des maîtres d’œuvres d’un album collectif séminal du début des années 80, sorte de free funk noise et improvisé, le premier Golden Palominos (avec Zorn).

 

 

Marc Ribot, grand inspirateur du projet « Dreamers », s’était déjà illustré dans des morceaux entre jazz dissonant et surf-rock, notamment la reprise endiablée de Caravan (de Duke Ellington) avec son premier groupe, les « Rootless Cosmopolitans » (album éponyme (1990) et Requiem for What’s His Name (1992)). Il faut également écouter l’incroyable Shrek (1994), entre Albert Ayler et martèlements industriels, ou le très beau Scelsi Morning (2003) sur Tzadik.

Enfin, n’oublions pas le guitariste Fred Frith et notamment le premier album de son groupe Massacre, Killing Time (1981), avec Bill Laswell et Fred Maher (basse et batterie), autre grand sommet de cette période ébouriffante, et Step Across The Border (1990, Zorn y apparaît sur un titre), sorte de carnet de voyage musical, où Frith retrace ses rencontres musicales dans un kaléidoscope d’une saisissante (et très plaisante) variété (l’album est la BO de l’excellent documentaire du même nom, signé Nicolas Humbert et Werner Penzel, où l’on peut prendre toute la mesure de l’humour et de la poésie de Frith).

 

 

cinquecento :
un serial producteur et son label de masse, Tzadik!!!
Là aussi, il est affaire d’une production qui se compte en centaines de titres, d’où notre numérotation « chapitrale », dont le double décuplement ne vous aura pas échappé. Alors Tzadik, comment s’y retrouver dans les quelques 500 titres du label dont un bon cinquième doit être le fait de Zorn à lui tout seul? Eh bien sachez, qu’outre les Archival Series, collection dédiée exclusivement à la parution des enregistrements de Zorn, anciens et récents, à l’exception des œuvres de musique de concert qui sont rangées dans la collection Composer Series (le design de pochette avec le cadre argenté), Tzadik compte autant de collections que Zorn a de centres d’intérêts plus que moins obsessionnels. La plus connue (et vaste) est certainement la RJC, Radical Jewish Culture, consacrée à la scène contemporaine des musiciens d’origine juive, faisant des relectures parfois avant-gardistes de musiques traditionnelles et des airs Klezzmer (David Krakauer). Ensuite, on trouvera la collection New Japan destinée à promouvoir la scène actuelle japonaise (Otomo Yoshihide, Ruins…), les enregistrements de figures clés de l’improvisation libre et du Jazz regroupés sous le titre Key (Derek Bailey, Evan Parker…), et enfin on fera un retour sur la collection Composer Series qui comprend, outre le boss de céans, d’autres figures emblématiques de la musique contemporaine (Alvin Curran, Morton Feldman, Harry Partch…).
Vu l’immensité du catalogue et la limitation de notre temps d’oreilles disponibles, on ne pourra donner que quelques pistes, forcément subjectives, mais aussi créatives que plaisantes.
RJC :
en musique instrumentale :
 
The Rabbi’s Lover (2002) de la violoniste Jenny Scheinman, une relecture acoustique soignée et inventive d’airs traditionnels,
Little Princess (2009), du guitariste Tim Sparks, une adaptation d’air du grand clarinetiste klezzmer Naftule Brandwein pour guitare acoustique avec les accompagnements de Greg Cohen et Cyro Baptista.
chants et chansons :
La Mar Infortuna (2001) de Jennifer Charles et Oren Bloedow, pour un recueil de chansons sépharadiques aux saveurs arabo-andalouses d’un climat assez envoûtant et parfois sombre,
Trilectic (2001), album a capella remarquable de Jewlia Eisenberg (membre de « Charming Hostess »), oscillant entre airs traditionnels juifs et doo-wop avec un groove très contemporain.
dans des contextes plus exotiques et percussifs,
El Danzon de Moises (2002) du percussionniste cubain Roberto Rodriguez, mélange entraînant de musiques juives et latines,
– le très rythmique Folkloriko (2004) de la percussionniste philippine Susie Ibarra,

 

Key :

Mirakle (2000) de Derek Bailey en power-trio free-funk avec Jamaaladeen Tacuma et Calvin Weston (anciens membres du Prime Time de Ornette Coleman). Intense, rock, groovy et d’une accessibilité peu commune dans le catalogue souvent ardu du guitariste,
Clearing (2002) de Fred Frith, l’un des meilleurs albums de guitare solo entre improvisation libre et structurée, avec des techniques percussives étourdissantes et un lyrisme rendant l’album (assez) accessible,
New Japan :
Null and Void (1995) de Ground Zero, la première formation du guitariste-platiniste Otomo Yoshihide, mélange très expérimental et énergique, de samples, de jazz et de noise.
Hyderomastgroningem (1995), l’un des tous meilleurs albums du duo Ruins, psychédélique, lourd et frénétique, avec des délires vocaux à la Magma,
Composer Series :
John Somebody (1986-2004) de Scott Johnson. La pièce titre fait dialoguer la voix mise en boucle d’un message vocal enregistré avec une guitare électrique qui en imite les intonations et le flux, pour construire progressivement le morceau par une série de variations et de répétitions (un travail un peu semblable à celui du québécois René Lussier),

Mbira Magic (2004) de Richard Crandell, un bel album de Mbira (orgue à pouce africaine), mélodique et rêveur, comme de longues comptines méditatives.

 

 Otto Preminger, « Mark Dixon, détective », 1950

 

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A propos de Robert Loiseux

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