Coralie Fargeat-  » The Substance »

The substance est un film de l’excès . Défier le « bon goût », franchir les bornes de ce qui est considéré comme tel, provoque toujours le scandale. Mais peut-être n’y a t-il pas d’autre manière pour Coralie Fargeat de s’affranchir non pas tant de l’académisme mais de ce qu’une sélection cannoise suppose : « un grand film » d’auteur.

De même, peut-on dire alors qu’il s’agit d’une impertinence calculée et « trop » démonstrative ? Non. S’en tenir à la mesure ou au bon goût , c’est aussi parfois répondre à une norme et à un conformisme , c’est couvrir les abus de pouvoir d’une société qui fait de la beauté un culte . D’où l’importance de l’exagération , et en particulier de l’exagération comique, de la caricature, qui, par définition, franchissent les bornes de la bienséance.

 À la norme , l’excès, résolument monstrueux, obscène et gratuit, s’oppose alors une puissance de transgression apte à faire surgir l’œuvre. Et c’est la raison pour laquelle The substance apparaît comme un film qui questionne l’assignation sociale imposée à la femme : assignation à celle qui vieillit et doit céder sa place , assignation à celle qui origine les fantasmes et les désirs. L’intelligence de Coralie Fargeat est de ne pas opposer l’une à l’autre .Aussi The substance met en scène Elisabeth Sparkle ( hallucinante Demi Moore), star d’une émission d’aérobic, que son patron licencie le jour de ses 50 ans. Mais Elisabeth reçoit une proposition inattendue. Un mystérieux laboratoire qui existe à travers une voix, lui propose une « substance » miraculeuse qui lui permettra de devenir « la meilleure version » d’elle-même, « plus jeune, plus belle, plus parfaite ».Une seule condition à cette promesse : partager son temps avec elle ( Sue, merveilleuse Margaret Qualley) une semaine sur deux. Mais voilà sous l’effet euphorisant d’un corps qui renaît , Elisabeth oublie la recommandation- recommandation à l’image du conseil donné par Hésiode à Persès- : il ne s’agit pas de supprimer la démesure ; il faut « ne pas la laisser grandir ». C’est alors dans cette tension constante que s’écrit son histoire , entre hubris et dikè, excès et mesure , démesure et sage modération. La forme du film se plie alors à «  son » récit basculant dans le body-horror, le dionysiaque et le grotesque. Mais c’est un regard féminin d’une puissance incroyable où le corps désormais «  ne peut plus être une donnée mais seulement une question et peut-être un tourment » ( 1).

(1) Nicole Brenez, De la figure en général et du corps en particulier. 

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