Une femme d’un certain âge explorant un appartement, le sien sans doute. Par un effet de distorsion ou de fragmentation du temps, elle se voit en train de jouer du piano dans une pièce contiguë à celle où elle se trouve ou pense se trouver. En une série de plans parfaitement cadrés qui ouvrent N’oublie pas les fleurs, le réalisateur saisit à merveille la sensation intérieure de confusion que peut provoquer la maladie d’Alzheimer, sujet central de ce premier long métrage de Genki Kawamura, adapté de son propre roman. Producteur de nombreux films d’animation, notamment ceux de Mamoru Hosoda ou Makoto Shinkai, Genki Kawamura s’est ouvertement inspiré d’une histoire personnelle, celle de sa grand-mère qui a perdu la mémoire. Aussi intime soit-elle, son approche n’est pas des plus originales, flirtant par moment avec les travers du mauvais mélodrame psychologique.  Cela dit, on est tout de même assez loin de la catastrophe de Se souvenir des belles choses de Zabou Breitman dont la seule ambition était de nous tirer quelques larmes.

N'oublie pas les fleurs

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Si le film ne tient pas les promesses de sa fracassante entrée, la construction du récit se dévoilant progressivement est intéressante. En effet, la simplicité du synopsis cache un film plus secret sur les rapports complexes, liés à l’abandon entre une mère et un fils. Ce fils c’est Izumi, qui lors du réveillon de Noël, retrouve sa mère Yuriko, errant dans un parc par un froid glacial. Peu de temps après, elle est diagnostiquée comme souffrant d’Alzeihmer, déclinant rapidement. Il est hanté par un souvenir traumatisant alors qu’il n’était qu’un enfant, celui de l’abandon de sa mère durant une année. Kawamura plonge alors dans les souvenirs cette mère au passé troublant comme un effet miroir inversé à sa perte de mémoire au présent. Le film raconte alors son aventure amoureuse avec un homme marié avec qui elle est restée un an. L’absence physique d’Izumi durant cette parenthèse d’une vie ne cesse de nous interroger.  Qu’est-il devenu pendant cette période chaotique ? Avec qui a-t-il vécu ? Y-at-il un père caché dans ce nœud familial jouant sur les non-dits ? Intelligemment, le film ne répond clairement à aucune question laissant le spectateur travailler, faire le tri.

N'oublie pas les fleurs

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Le retour au présent, inévitable est en revanche moins passionnant. Genki Kawamura emprunte les voies du drame familial classique, dessinant avec tact le portrait de deux êtres qui se sont éloignés l’un de l’autre. Prenant soin de sa mère, Izumi doit aussi accepter de la perdre à nouveau, cette fois-ci pour toujours. Il tente pour la dernière fois de se rapprocher d’elle au moment où il va devenir père. Une certaine mollesse gagne en filigrane un film qui ne parvient pas à être aussi émouvant qu’il l’aurait souhaité, trop démonstratif dans son dernier acte, passage en force émotionnel qui révèle les coutures artificielles de la narration. La mise en scène, pourtant auréolée d’un prix au festival de San Sebastian en 2022 est aussi variée qu’impersonnelle, alternant sans réel point de vue stylisation et naturalisme, hybridation formelle plus paresseuse qu’audacieuse. La  très belle lumière, insistant sur les tons jaunes ne parvient pas à masquer le manque de consistance et d’aspérité, surtout dans le traitement de la maladie. Le regard délicat du cinéaste s’accompagne aussi de facilités scénaristiques et d’une issue pour le moins convenue.

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Genki Kawamura signe un joli film séduisant mais convenu ponctué de quelques beaux coups d’éclats qui doivent beaucoup aux charmes de ses interprètes, à commencer par la vétérante Mieko Harada, magnifique dans le rôle de la mère. Les amateurs de cinéma japonais seront aux anges, elle qui a partagé l’affiche des films de Akira Kurosawa, Yazuso Masumara ou encore Kinji Fukasaku. Pour elle, N’oublie pas les fleurs mérite le déplacement.

(JAPON-2022) de Genki Kawamura  avec Mieko Harada, Masaki Suda, Nasami Nagasawa

 

 

 

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