Guy-Roger Duvert – « Virtual Revolution »

Virtual Revolution de Guy-Roger Duvert est un premier film étonnant, à maints égards. Un Blade Runner 2.0 quasiment autoproduit. Un film d’anticipation, tourné en anglais, avec un casting international, par un réalisateur français dans un (néo) Paris, filmé comme rarement. De quoi se réjouir sur l’avenir du cinéma de genre, même si Virtual revolution est assez pessimiste sur le futur…

virtual-revolution-001Duvert a réalisé Virtual Revolution après son court-métrage Cassandra, qui a remporté 105 sélections et 58 prix. C’est le court-métrage le plus primé historiquement dans sa catégorie –peu courant : le médiéval fantastique.
Nul besoin d’être gamer ou roliste ou inconditionnel de science-fiction pour apprécier ce film à l’intrigue prenante et à l’esthétique aboutie, malgré les manques de moyens.
2047, à Paris, la réalité virtuelle a créé sa propre réalité. La population se partage entre connectés et hybrides, soit ceux qui sont en permanence dans la réalité virtuelle et ceux qui alternent virtualité et réalité. Nash, un agent employé par une multinationale, est chargé de traquer des terroristes qui menacent le système. Mais lui-même, n’est-il pas manipulé ? Reste-t-il encore des personnes ne confondant pas réalité et virtualité ?

w_virtual-revolution-trailerLa réussite du film de Duvert tient dans sa croyance au récit, son casting impeccable et surtout, la capacité des acteurs à totalement investir leurs personnages, avec des dialogues d’exposition qui ne passent jamais pour explicatifs, alors que ca pourrait être le risque. Probablement galvanisés par leur réalisateur, les comédiens se sont investis dans le projet à 1OO%. Car, souvent, ce genre de film provoque un hiatus entre ses intentions et leur énonciation par les comédiens. Ici, nul problème d’inadéquation de ce type.
Virtual Revolution marche également grâce à son ambiance de film noir, réussie notamment via une image très travaillée : lumière impeccable qui transcende la vidéo, décors chiadés, même s’ils louchent ouvertement (et pourquoi pas ?) sur ceux de Blade Runner, convoqué plusieurs fois indirectement, ainsi que Strange Days, pour son propos ; il y a pire comme références !
Enfin, ce qui emporte la partie c’est l’aspect politique du film qui a l’intelligence de ne jamais virer au pensum, tout en posant des questions essentielles, telles que : est-il possible de forcer quelqu’un à être libre ? Et si oui, est-ce bien ?  Bien sûr, Virtual Revolution n’est pas exempt de défauts, mais un pari audacieux, en grande partie gagné. L’idée est venue au cinéaste suite à un article, lu en 2005, qui parlait d’un type de jeu vidéo permettant de se créer un avatar et de vivre des aventures dans un monde virtuel persistant. Même si nous ne jouons pas, le jeu continue, avec d’autres personnes connectées. Dans l’article, 25% des joueurs avouaient accorder plus de temps au monde virtuel en jeu qu’à leur vie réelle. Je me suis dit que ce n’était que les débuts, et qu’à l’avenir, ce ne serait plus 25% mais beaucoup plus. D’où notre hypothèse d’une société déconnectée du monde réel, avec 75% tourné vers le monde virtuel dixit Duvert.
Un film d‘autant plus intéressant qu’il échappe aux étiquettes, car comme le résume bien son auteur : Une des difficultés que nous avons rencontrées dans ce film, c’est la catégorisation de ce film. Si nous avions été un blockbuster avec de gros moyens, cela aurait fonctionné. Si nous avions été un film indépendant avec de petits moyens et pas d’ambition graphique, cela aurait fonctionné aussi. Mais nous avons un film indépendant avec de petits moyens, mais qui donne l’impression que c’est un gros film. De ce fait, c’est très perturbant, et il y a sur ce film un problème de case, qui existe au niveau des distributeurs, mais je pense, pas au niveau des spectateurs.

V 2 RLe pitch nous informe que La révolution est arrivée, mais pas celle qu’on pensait. En revisitant un genre injustement boudé et méprisé en France, le film de Guy-Roger Duvert est un mini-révolution en soi.
Ce n’est pas pour rien que Duvert s’est exilé aux Etats Unis et n’a trouvé aucun fonds en France, son pays d’origine. Une réussite quant au peu de moyens, inversement proportionnel au nombre de (bonnes) idées. Aller le voir est un devoir de cinéphile et de citoyen (vous comprendrez en voyant le film !..). Non que ca soit un chef d’oeuvre absolu, mais un film indépendant dans tous les sens du terme.
La première journée d’exploitation,  Virtual Revolution est arrivé premier en terme de classement par copies : pas moins de 190 entrées, coiffant au poteau des grosses productions, comme L’odyssée ( 147 ), Captain Fantastic (126) et Cigognes (97 entrées). De quoi garder espoir pour tout un pan du cinéma indépendant, surtout ce pan spécialement mal aimé en France : celui de la science fiction et de l’anticipation.

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