Hantée par la disparition brutale et mystérieuse de son mari, une femme navigue entre Tokyo, monde réel, et Manazuru où s’évade son imaginaire intime. D’un côté une maison habitée par trois générations de femmes, où la vie perdure au gré du quotidien, de l’autre une station balnéaire où le passé et le présent s’imbriquent dans de douloureuses évocations. Au milieu, un amant marié, figure d’impossible nouveauté.Il se dégage du récit une atmosphère cotonneuse, comparable à un rêve ou une forte fièvre. Le style, concis et épuré, donne une véritable force à l’introspection et pousse rapidement à adhérer à l’action, tangible ou hallucinée. Si les mythes font partie de la réalité du personnage dans leur persistance à travers les rites, légèrement abordés, c’est la souffrance palpable du deuil qui provoque les visions étranges dont elle est à la fois héroïne, victime ou impuissante spectatrice, tiraillée entre la volonté et la douleur de se souvenir.

Dans de délicats passages sans transition, le lecteur découvre toutes les facettes internes de cette femme qui observe son enfant grandir, frémit lors des changements de saisons, brûle dans l’étreinte de son amant, oscille patiemment de la maîtrise de soi au dévorement intérieur. Le rapport au temps est central, dilué dans la longueur du processus d’acceptation et concentré dans l’intensité des émotions qui se superposent. L’auteur nous propose ainsi, sans distance ni intellectualisation, une appréhension sensible de l’attente, de la solitude, du cheminement de l’âme et du corps, livrés à la nature et à ses effets.

« J’ai du mal à m’habituer. Mon corps ne s’habitue pas. Lorsque j’ai fini par m’accoutumer à la qualité d’une atmosphère, seule ou non, si quelqu’un s’en va ou qu’un autre arrive, l’air ambiant se modifie, et je suis incapable sur le moment de m’adapter à ce changement. »
« Où commençait vraiment la mémoire, où s’arrêtait le souvenir, peut-être rien de tout cela n’avait existé depuis le début, peut-être m’en souviendrais-je jusqu’à la fin… »

Publié aux Editions Philippe Picquier.

© Tous droits réservés. Culturopoing.com est un site intégralement bénévole (Association de loi 1901) et respecte les droits d’auteur, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos visibles sur le site ne sont là qu’à titre illustratif, non dans un but d’exploitation commerciale et ne sont pas la propriété de Culturopoing. Néanmoins, si une photographie avait malgré tout échappé à notre contrôle, elle sera de fait enlevée immédiatement. Nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur – anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe.
Merci de contacter Bruno Piszczorowicz (lebornu@hotmail.com) ou Olivier Rossignot (culturopoingcinema@gmail.com).

A propos de Sarah DESPOISSE

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.