Dante, Russell, Hellman, Cunningham, Gaeta – "Trapped Ashes" (Blu-Ray et DVD)

Il faut parfois savoir s’abandonner à quelques petits plaisirs coupables. Avec Trapped Ashes, on replonge avec un délice parsemé de malice dans la plus pure tradition des films à sketches horrifiques des années 80. Les vieux bonhommes qui commettent ces quatre segments et son emballage : Joe Dante, Ken Russell, Sean Cunnigham, Monte Hellman et John Gaeta, ne cachent d’ailleurs pas vraiment une certaine nostalgie de l’horreur dans ce qu’elle a de moins gore et de plus ancrée à l’intérieur de tout un chacun.Conviés à visiter les studios abandonnés d’une ancienne firme de films d’horreur, six individus (dont deux couples) prennent place à bord du petit train blanc idoine, conduit par un vieux chauffeur roublard et probablement un peu fou. Leur parcours les mènent à une maison hantée d’un style proche de celle de Psychose qu’il est défendu de visiter, bien sûr. La mécanique est en marche et ses rouages grincent comme les dents des fausses (?) têtes qui garnissent les meubles.
Le côté train fantôme suranné a son charme et si l’on accepte de suivre le guide au sourire dissimulé dans les rides, nous pénétrons dans un monde où les poupées de faïence sont remplis de vers. En effet, chacun de nos sympathiques visiteurs devront, s’ils souhaitent s’échapper de la maison hantée – comme un contrat maléfique – livrer aux autres leur côté horrible.
Les quatre segments proposés s’articulent autour d’un même thème : l’aliénation. Le premier, celui de Ken Russell est le plus extravagant, le plus fantasque et probablement le plus vintage avec sa photo TV kitsch. Il met en scène une fille voulant une poitrine plus généreuse. Le chirurgien qu’elle va voir lui vante les mérites de sa pratique : implanter des poitrines de femmes décédées (carrément moins dégueux que le silicone)… Par a+b, les seins de la fille ne sont mais plus du tout catholiques ; on ne vous dit pas tout, faut pas gâcher la surprise.
Les segments suivants ne surfent pas sur le même délire fantastico-comique, et empruntent une veine psychologique qui a l’avantage pour celui de Cunningham d’explorer les arcanes du désir de son personnage féminin, pour celui de Hellman de rendre un hommage au cinéma (et plus largement à l’art), pour celui de Gaeta d’imaginer l’expression matérielle du mal être d’une ado.Cunningham nous mène au Japon, où un couple américain à la dérive apprend à se retrouver au contact d’un incube ancestral prenant possession de la femme. Un segment intéressant qui parvient à garder un certain mystère un peu moite (sic) et à susciter un attrait réel pour le démon qu’il met en scène (ou plutôt pour l’attrait pour le démon). A cela s’ajoute quelques utilisations de dessins plutôt convaincantes au sein du film relevant de brutalité des images – animées – forcément plus sensuelles.
Hellman quant à lui s’éloigne encore plus de la jouissance de Russell et dresse une sorte d’hommage en creux à Stanley Kubrick, par lui au cinéma, par lui à l’art. Peu d’horreur ici, plutôt une évocation, une esquisse de succube (cette fois-ci) qui pourrait tout aussi bien être une muse.
Le segment de Gaeta (directeur des effets spéciaux sur Matrix) est par contre un peu plus obscur. Si l’idée initiale d’une gémellité entre une enfant et un ver solitaire est suffisamment étrange pour ouvrir des portes d’horreur, l’histoire peine à entrer dans l’une d’entre elles et faire jaillir quelque chose de véritablement effrayant.

Quoiqu’un peu inégal et aux segments disparates (entre le Russell et le Hellman), Trapped Ashes est une occasion sympathique de renouer avec la tradition des Contes de la Crypte et de compléter votre collection des Masters of Horror. On peut regretter par contre l’absence de sous-titres et la piètre qualité du doublage français.
Pour curieux avertis et anglophones.

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