On attendait avec impatience la 9ème édition du Festival Lumière. Après neuf jours passés dans les salles obscures et un total de 18 séances (+ une masterclass) on peut dire que la semaine fut intense et riche en découvertes (et redécouvertes) : on est tout simplement pas loin de penser qu’il s’agissait de l’édition la plus dense depuis la création du festival.

Des restaurations souvent irréprochables, on pense notamment à l’œuvre d’Henri-Georges Clouzot célébrée pendant la manifestation qui ressort en Blu-Ray et dvd dans les jours qui viennent (et sur laquelle il est conseillé de se ruer) : En Blu-Ray, Les Diaboliques et Le Salaire de la Peur intègrent l’excellente Collection Héritage, Quai des Orfèvres, La Prisonnière et Le Corbeau débarquent chez StudioCanal, quand Miquette et sa Mère sort lui chez Pathé et Le Mystère Picasso chez Gaumont (L’assassin Habite au 21 étant déjà disponible en Blu-Ray chez ce même éditeur depuis 2013). On peut ajouter cette fois uniquement en DVD la sortie de deux coffrets, l’un baptisé L’Essentiel Clouzot contenant 13 DVD – chez TF1 Vidéo – soit une intégrale quasi complète ainsi qu’un autre coffret, Clouzot avant Clouzot – chez Lobster Filmscontenant six films très rares scénarisés par Henri-Georges Clouzot  durant les années 30 dont Château de Rêve de Geza von Bolváry diffusé pendant le festival. Une œuvre majeure du cinéaste demeure pourtant inédite pour cause de droits vidéos bloqués : La Vérité portée une incroyable Brigitte Bardot, que l’on a pu revoir sur grand écran dans une superbe copie restaurée à l’étranger. On espère désormais une chose : que cette situation figée s’arrange vite et que le film puisse enfin sortir dans une édition digne de ce nom.

Plus que Wong Kar-wai discret prix Lumière, deux immenses cinéastes auront marqué le festival par leur générosité, leur omniprésence et leur passion communicative : Guillermo Del Toro et William Friedkin. Le cinéaste Mexicain présent les premiers jours  a présenté son fabuleux nouveau film The Shape of Water (auréolé du lion d’or à la Mostra de Venise en septembre dernier), des films issus de sa carte blanche (dont la très belle découverte que fut le premier long-métrage de Georges Franju La Tête contre les Murs), une masterclass où s’est invité dans la salle son complice Alfonso Cuarón, et enfin une nuit présentant 4 de ses films (Le Labyrinthe de Pan / Hellboy / Cronos / Pacific Rim) où le cinéaste est revenu sans prévenir discuter avec les spectateurs encore debout à l’aube sur le coup des 5/6 heures du matin. Guillermo Del Toro fut aussi l’invité surprise de la masterclass de Michael Mann précédant la projection de Heat. Il a alors brièvement évoqué un projet de collaboration avec le maitre Américain qui fait déjà saliver soit sous la forme d’un documentaire d’entretien soit sous la forme d’un livre conçu à la manière du Hitchcock/Truffaut où les deux cinéastes seraient rejoint par le non moins grand George Miller : affaire à suivre.

William Friedkin arrivé à Lyon en milieu de Festival ne s’est pas contenté de faire acte de présence mais s’est distingué par son charisme hors norme, sa forme olympique (le cinéaste a quand même 82 ans) et surtout sa propension à faire le show partout où il venait présenter ses films.
On était à la séance du longtemps mésestimé mais pourtant immense  Cruising,  une présentation qui a duré près de 30 minutes, – celles de Sorcerer et French Connection les jours suivants auraient explosées ce compteur – jubilatoire, riche en anecdotes – certaines déjà évoquées dans sa passionnante autobiographie Friedkin Connection – et surtout sans la moindre langue de bois. Cette présentation a fait office d’apéritif avant la masterclass à laquelle nous avons assisté le lendemain. Showman hors pair – il est par exemple resté debout pendant toute la masterclass – le cinéaste a évoqué en détails son parcours avant de parler de ses premiers films, même si l’exercice a duré près d’une heure quarante-cinq, il n’aura finalement eu le temps d’évoquer que L’Exorciste et French Connection, chaque question occasionnant une réponse minutieuse ponctuée de savoureuses digressions. À n’en pas douter cela aurait pu continuer plusieurs heures si Friedkin n’avait pas été rappelé par les équipes du festival pour aller présenter Sorcerer. Désolé de ne pouvoir prendre le temps de signer dvd, blu-ray, livres ou autres pour le public présent, le cinéaste a alors invité tout le monde à le rejoindre à l’Institut Lumière promettant une disponibilité totale dès lors qu’il aurait terminé sa présentation.

Invité récurrent du festival, Nicolas Winding Refn a fait un passage à Lyon pour présenter un projet digital, un site internet baptisé byNWR.com. Dans un ton qui irritera au plus haut point ses détracteurs autant qu’il amusera ses adeptes – dont on fait partie – le cinéaste Danois est venu annoncer la mort du cinéma et sa renaissance se présentant en tant que  « troisième frère Lumière ». Plus concrètement, à l’heure où la consommation du cinéma évolue, où les plateformes de streaming et téléchargement explosent, NWR va lancer à son tour sa propre plateforme. Grand collectionneur de films oubliés, il s’est associé au créateur de la plateforme MUBI pour faire partager ses trouvailles et sa collection. L’idée serait de projeter un film par mois qui servirait de point de départ créatif pour d’autres formes artistiques. L’année sera découpée en quatre trimestres et chaque trimestre, un invité deviendra le rédacteur en chef du site avec pour mission « de créer du contenu autour du film, de la fascination et d’éveiller la curiosité ». Contrairement aux autres plateformes déjà existantes, NWR promet la sienne totalement gratuite, sans abonnement, sans publicité, pour le citer « rien qui puisse corrompre la jeunesse ». Le site sera lancé en Février 2018 et le premier film présenté sera The Nest of The Cuckoo Birds de Bert Williams, un film datant de 1965 dont la restauration a été entièrement financée par Nicolas Winding Refn.

Le festival a beau être terminé, il joue désormais les prolongations comme chaque année à l’institut Lumière jusqu’au 12 Novembre avec un best-of de la programmation de l’édition 2017 (que l’on dévoile plus bas).

Les Prix remis lors de cette 9ème édition :

Le Prix Raymond Chirat a été remis à Manuel Chiche, éditeur, distributeur et producteur (The Jokers, La Rabbia).
Le Prix Raymond Chirat récompense chaque année une personnalité œuvrant à la préservation et à la transmission de la mémoire du cinéma.

Le Prix Fabienne Vonier a été remis à Caroline Benjo et Carole Scotta, fondatrices de la société de production Haut et Court.
Le Prix Fabienne Vonier est remis par l’Institut Lumière et Francis Boepsflug à la mémoire de Fabienne Vonier, co-fondatrice de la société Pyramide.

Le Prix Bernard Chardère a été remis à la journaliste de France Inter Eva Bettan.
Le Prix Bernard Chardère récompense un critique et auteur, une personnalité marquante du cinéma….

Le Prix des Lycéens a été décerné à Chungking Express de Wong War-wai.
Le prix des lycéens est choisi parmi l’ensemble des films de la programmation par un panel de 2000 Lycéens de la région Auvergne – Rhône-Alpes.

Le Prix Lumière a été remis à Wong Kar-wai.
Le Prix Lumière a été créé par Thierry Frémaux et Bertrand Tavernier afin de célébrer à Lyon une personnalité du septième art, à l’endroit même où le Cinématographe a été inventé par Louis et Auguste Lumière et où ils ont tourné leur premier film, Sortie d’Usine, en 1895.

Quelques chiffres :

Le festival Lumière a compté 171 000 festivaliers cette année, soit une augmentation de 7% par rapport à la précédente édition et un taux de remplissage des séances de 92 %.
Le Marché du film classique est également en hausse cette année,  avec + 15 % avec 350 professionnels et 21 pays représentés.

 

Pour écouter/réécouter les différentes masterclass de l’édition :

 

Programme du Best Of Lumière 2017 (du 26 Octobre au 12 Novembre) :

 

 

Wong Kar-Wai : Prix Lumière 2017
In the Mood for Love de Wong Kar-wai (2000, 1h38) Dimanche 5/11
2046 de Wong Kar-wai (2004, 2h08) Samedi 28/10 / Dimanche 29/10
My Blueberry Nights de Wong Kar-wai (2007, 1h35) Vendredi 10/11 – Mardi 14/11

Carte Blanche à WKW
Blind Massage de Lou Ye (2014, 1h54) Vendredi 3/11 – Mardi 7/11

Le mystère Clouzot
Couzot Scénariste : Le Dernier des six de Georges Lacombe (1941, 1h37) Jeudi 26/10 – Samedi 28/10
Le Corbeau de Henri-Georges Clouzot (1943, 1h32) Mercredi 8/11 – Vendredi 10/11
Quai des Orfèvres de Henri-Georges Clouzot (1947, 1h46) Mercredi 1er/11 – Dimanche 5/11
Les Diaboliques de Henri-Georges Clouzot (1955, 1h57) Samedi 28/10 – Dimanche 29/10 – Mardi 31/10

Westerns Classiques
Le Train sifflera trois fois de Fred Zinnemann (1952, 1h25) Mercredi 1er/11 – Samedi 4/11
L’Appât d’Anthony Mann (1953, 1h30) Vendredi 27/10 – Samedi 28/10

Diane Kurys
Coup de foudre de Diane Kurys (1941, 1h37) Dimanche 29/10 – Mardi 31/10

William Friedkin
French Connection de William Friedkin (1971, 1h44) Jeudi 2/11 – Samedi 4/11

Carte Blanche à Guillermo Del Toro
La Tête contre les murs de Georges Franju (1959, 1h35) Jeudi 2/11 – Samedi 4/11

Restaurations
L’Affaire du courrier de Lyon de Claude Autant-Lara et Maurice Lehmann (1937, 1h32) Jeudi 9/11 – Mardi 14/11
La Fête à Henriette de Julien Duvivier (1952, 1h50) Mercredi 8/11 – Samedi 11/11
La Ciociara de Vittorio De Sica (1960, 1h40) Vendredi 3/11 / Mardi 7/11
Un Enfant Attend de John Cassavetes (1963, 1h42) Jeudi 9/11 – Samedi 11/11
1900 de Bernardo Bertolucci (1976, 5h16, 1ère partie 2h42, 2e partie 2h34) Dimanche 12/11
Annie Hall de Woody Allen (1977, 1h33) Mercredi 1/11  – Dimanche 5/11  – Samedi 11/11
La Leçon de Piano de Jane Campion (1993, 2h01) Jeudi 26/10  – Vendredi 27/10

Pour les Enfants
La Prophétie des Grenouilles de Jacques-Rémy Girerd (2003, 1h30) Mercredi 1/11 – Samedi 4/11 – Mercredi 8/11

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A propos de Vincent Nicolet

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